Qu’est-ce qui pourra sauver l’amour?

Clarisse Gorokhoff

Rien, j’espère bien. Ce qui est chouette avec l’amour c’est que, pour être aussi absurde que la vie, c’est un sentiment irrécupérable, irrémédiable et parfaitement insolvable. Et tant mieux. Pardonnez-moi de commencer par la conclusion, mais parfois il faut être un peu catégorique et impartial sinon on déblatère dans le vide, alors qu’on pourrait tranquillement faire l’amour.

Le polyamour, le couple libre, le trouple, etc. On parle beaucoup des nouvelles formes et pratiques de l’amour ces temps-ci, autant dire de ses nouveaux carcans, qui ne vont pas sans de nouvelles règles (donc de nouvelles contraintes et de nouvelles menaces). Des noms (pas terribles), des intitulés (lourdingues), des définitions (qui ne définissent rien), comme si l’on essayait de rentrer de force des affaires en vrac dans une boîte étroite, sur laquelle on collerait un Post-it illisible menaçant de s’envoler. Mais où est l’amour là-dedans ? Ce sont des petits comptes de chipoteurs tout ça, des contorsions pour se défiler, pour ne surtout pas se prendre la grande claque voluptueuse et magistrale de sa vie. Aimer, PAF ! Être aimée, VLAN ! Ça fait circuler le sang.

Qu’est-ce que ça nous coûte d’admettre que face à ce sentiment absurde, merveilleux et vain, nous sommes parfaitement impuissants ? S’aimer à deux ou à 18, dans le même lit ou dans des chambres séparées, à distance ou collé-serré, un jour sur deux ou chaque seconde de chaque jour… Qu’importe ? Aimons-nous les uns les autres, comme bon nous semble, dans la douleur et dans la joie, dans le mystère et la fantaisie, dans la légèreté et la solennité, dans le chaos et l’harmonie… Et fichons-nous la paix - smack !

Que la nouveauté de l’expérience soit une tentation grisante, un désir enfantin d’explorer le champ des possibles et leurs limites, c’est en un sens excitant. Que le jeu s’immisce dans la complexité des sentiments, c’est compréhensible et plutôt sain. Mais que l’envie nous prenne de lancer une énième mode, comme nos parents et nos grands-parents ont tenté de le faire, pour tâcher de se persuader que ça y est, enfin, on a trouvé la solution, on sait désormais comment s’aimer au mieux et dans les meilleures conditions… Ça rime à quoi ? Qu’avons-nous à prouver et à qui ? Pourquoi vouloir à tout prix des définitions, des nouveaux commandements.

Faune

Les souvenirs tremblent Se meurent en fantômes Et du fond de ma chambre Les monstres deviennent faune Quelque part élégants Subtils et effrayants Rien n'est ni noir ni blanc Je fais partie de la faune Un monstre comme tant et tant Un monstre tout vivant Les souvenirs se fondent Se marient se confondent Ne reste que des après Des pourvus... Des jamais Et puis les pourquoi pas ? Les convenus, les fadas Les souvenirs dansent Macabres conséquences Des espoirs trop las Et qui de la paresse Jamais ne cesse De nourrir nos combats Les souvenirs persistent Nous disent qu'on existe Qu'en fait tout passe hélas Ou tant mieux ou tant pis Et que dans cette mélasse Est le goût de la vie.

—Agnès Jerlin

Illustration JAMES STARTT...

Rien, j’espère bien. Ce qui est chouette avec l’amour c’est que, pour être aussi absurde que la vie, c’est un sentiment irrécupérable, irrémédiable et parfaitement insolvable. Et tant mieux. Pardonnez-moi de commencer par la conclusion, mais parfois il faut être un peu catégorique et impartial sinon on déblatère dans le vide, alors qu’on pourrait tranquillement faire l’amour. Le polyamour, le couple libre, le trouple, etc. On parle beaucoup des nouvelles formes et pratiques de l’amour ces temps-ci, autant dire de ses nouveaux carcans, qui ne vont pas sans de nouvelles règles (donc de nouvelles contraintes et de nouvelles menaces). Des noms (pas terribles), des intitulés (lourdingues), des définitions (qui ne définissent rien), comme si l’on essayait de rentrer de force des affaires en vrac dans une boîte étroite, sur laquelle on collerait un Post-it illisible menaçant de s’envoler. Mais où est l’amour là-dedans ? Ce sont des petits comptes de chipoteurs tout ça, des contorsions pour se défiler, pour ne surtout pas se prendre la grande claque voluptueuse et magistrale de sa vie. Aimer, PAF ! Être aimée, VLAN ! Ça fait circuler le sang. Qu’est-ce que ça nous coûte d’admettre que face à ce sentiment absurde, merveilleux et vain, nous sommes parfaitement impuissants ? S’aimer à deux ou à 18, dans le même lit ou dans des chambres séparées, à distance ou collé-serré, un jour sur deux ou chaque seconde de chaque jour… Qu’importe ? Aimons-nous les uns les autres, comme bon nous semble, dans la douleur et dans la…

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