Dans les poches du mort

Laurence Biberfeld 

Dans les poches du mort

On trouva

Plus innombrables que des
grains de sable

Des humains

Des humains petits cailloux

Des humains clous

Des humains fil de fer

Des humains mouchoir
en papier

Des humains épluchures

Des humains bonbons

Des humains brindilles

Des humains clopes et des humains cachet

Des humains froissés

Des humains pliés

Des humains déchirés

Des humains cachés

Des humains ficelle

Des humains pense-bête

Les poches du mort étaient innombrables

Pleines à craquer

Trouées

La gabardine du mort

Était une armoire normande

Un buffet gigantesque

Mais quand on dévêtit le mort

On le trouva tout petit dans son grand manteau 

Qui ne l’avait pas protégé
du froid

Quand on dévêtit le mort

On le trouva mort de froid

Il avait dans sa petite main d’enfant

Un miroir brisé

Qui ne lui avait renvoyé que son image

Morcelée

Kaléidoscopique

Réfléchie sans pensée

Sur la surface de tous ces
humains-objets

Qui peuplaient ses poches

Qui s’entretuaient

Rêvaient

Étouffaient

Dans ses poches

Quand on dévêtit le mort

De ses tiroirs crevés

De ses poches à secrets

De ses fuites à revers et de ses pirouettes en abyme

S’éleva une buée

Impuissante à prendre forme

Et qui pourtant faisait penser à l’amour

Faisait penser au mouvement de marée de l’amour

Flux et reflux

Paresseuse pulsation du plaisir

Jamais saisi

Impalpable fantôme de sang

Dans les corridors des artères étourdies

Quand on dévêtit le mort

On trouva dans sa bouche

Sa langue qui cherchait à naître

Parfaite comme un fœtus

Avant que son espèce spécifique lui donne forme

Parfaite et ingénue comme la mémoire des étoiles

S’incarnant dans le tortillon rose

D’une tentative de chair

Le petit mort de froid

S’éparpilla

Comme les épluchures, les
brindilles, les mouchoirs en papier, les petits cailloux, les clous,
les clopes et les cachets,
le fil de fer et les bonbons

Et puis le pense-bête aussi

Mais le beau colimaçon palpitant de sa langue fœtale

Dans sa bouche on le cueillit

On le porta en terre comme une graine endormie

Avec mille égards on versa sur lui

L’amour fondant de la terre

Et on laissa le ciel attendre

La pluie tomber

Le soleil briller....

Dans les poches du mort On trouva Plus innombrables que des grains de sable Des humains Des humains petits cailloux Des humains clous Des humains fil de fer Des humains mouchoir en papier Des humains épluchures Des humains bonbons Des humains brindilles Des humains clopes et des humains cachet Des humains froissés Des humains pliés Des humains déchirés Des humains cachés Des humains ficelle Des humains pense-bête Les poches du mort étaient innombrables Pleines à craquer Trouées La gabardine du mort Était une armoire normande Un buffet gigantesque Mais quand on dévêtit le mort On le trouva tout petit dans son grand manteau  Qui ne l’avait pas protégé du froid Quand on dévêtit le mort On le trouva mort de froid Il avait dans sa petite main d’enfant Un miroir brisé Qui ne lui avait renvoyé que son image Morcelée Kaléidoscopique Réfléchie sans pensée Sur la surface de tous ces humains-objets Qui peuplaient ses poches Qui s’entretuaient Rêvaient Étouffaient Dans ses poches Quand on dévêtit le mort De ses tiroirs crevés De ses poches à secrets De ses fuites à revers et de ses pirouettes en abyme S’éleva une buée Impuissante à prendre forme Et qui pourtant faisait penser à l’amour Faisait penser au mouvement de marée de l’amour Flux et reflux Paresseuse pulsation du plaisir Jamais saisi Impalpable fantôme de sang Dans les corridors des artères étourdies Quand on dévêtit le mort On trouva dans sa bouche Sa langue qui cherchait à naître Parfaite comme un fœtus Avant que son espèce spécifique lui donne…

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