Fleshtones' Peter Zaremba (détail) ©Aurélie Pollet
Fleshtones' Peter Zaremba (détail) ©Aurélie Pollet

Peter Zaremba’s not dead!

Mathieu Perez

un demi-siècle de rock’n’roll avec les Fleshtones
Rouillé, Peter Zaremba, le leader du mythique groupe US ? Ses prestations scéniques disent tout l’inverse ! Il s’agite, se déhanche, va au contact du public... À 67 printemps, il a gardé cette soif de vivre et de jouer intacte.
Inoxydables, les Fleshtones ! Fondés en 1976 à New York, ils se sont fait remarquer par leur folle énergie sur scène, leur esprit bon enfant, leur autodérision. D’ordinaire, ces gais lurons sont en tournée en Europe où ils ont des hordes de fans, une fois par an. Covid oblige, Peter Zaremba s’est rabattu sur les deux émissions de rock qu’il anime sur SiriusXM, une radio sur le net. Et sur les chansons qu’il peaufine avec son copain Florent Barbier, -l’ex-Roadrunners, avant de les sortir en solo sur un 45 tours. Un pis-aller en attendant de sauter dans un avion pour l’Europe. La coronacrise, il la passe dans le Connecticut. Il y vit avec son épouse Marilla, peintre. Leur fils adoptif, Sergei, étudiant, est resté dans la maison familiale à Brooklyn. Sur FaceTime, l’application de visioconférence, Peter nous apparaît avec sa trombine cartoonesque : bouille joviale, petite mèche, chemise à fleurs de dandy, et un air d’éternel ado incapable de se prendre au sérieux. Quarante-six ans que ça dure, les Fleshtones ! Une exception dans le paysage du rock. S’ils n’ont jamais atteint la célébrité d’autres rockeurs de la génération CBGB, du nom du fameux club de rock new-yorkais, pas une once d’amertume. La passion de Zaremba pour la musique vient de loin, de son enfance dans une famille prolo de l’autre côté de l’East River, dans le Queens. Les parents travaillent de nuit : le père est chauffeur de camion-citerne, la mère trime dans une usine de chewing-gum. Sa jeunesse est typique des États-Unis des années 1960 : il écoute des heures durant des disques avec sa grande sœur (« les Beatles ! »). Est accro à la radio. Grandit devant la télé. Idolâtre Little Richard, Eddie Cochran, les Kinks (il teint en rose son jean blanc pour ressembler à Dave Davies). Se met à l’harmonica. Invente des noms de groupes imaginaires (Dirty Milk, Twenty-Flight Rock). Dès l’adolescence, ce grand dégingandé devient un fêtard invétéré. Ses copains Keith et Marek, futurs Fleshtones, louent une maison dans le Queens et y organisent de grosses noubas arrosées de Blue Whale. La recette de ce cocktail bleu est très simple : dans une poubelle recouverte d’un sac en plastique, verser une bouteille de limonade glacée puis une bouteille de curaçao bleu et deux bouteilles de vodka. Multiplier les ingrédients, comme les poubelles, par dix, cinquante ou cent, en fonction du nombre d’invités. Trip psychédélique assuré ! Jusqu’alors, Zaremba aidait ses potes à monter des groupes, mais se sentait trop timide pour les accompagner. « Et puis, un jour, Keith et Marek jouaient de la musique au sous-sol de la maison. J’ai pris mon courage à deux mains, j’ai sorti mon harmonica et me suis joint à eux. » Les Fleshtones étaient nés. D’abord, ils animent les parties du Queens. Ensuite, visent Manhattan. « On n’était pas très accomplis musicalement. Mais tout semblait possible à cette époque. » 

« On n’avait pas de légende noire. On n’était pas des camés. Alors on nous prenait pour un groupe de twist. »

Un New York qui n’existe plus. Crade, au bord de la faillite, vidé en partie de sa classe moyenne blanche. Petit tour d’horizon : au nord, il y a Upper West Side et Upper East Side, les quartiers les plus sûrs, qui bordent Central Park. Au centre, Times Square, capitale des cinémas porno et de la prostitution. Plus au sud, West Village est l’épicentre gay. De l’autre côté, le quartier craignos mais branché du East Village abrite l’avant-garde artistique. Jusqu’à Tribecca, à la pointe sud, c’est

Fleshtones' Peter Zaremba ©Aurélie Pollet
une succession d’immeubles à l’abandon et de terrains vagues. La pauvreté est partout, les appartements sont infestés de cafards et souvent cambriolés, le métro tombe en ruine, les ordures s’entassent dans les rues... Dans ce chaos naît une incroyable effervescence culturelle. Un seul exemple : le CBGB (prononcez « ci-bi-dji-bi »). Ces initiales signifient Country, Blue Grass and Blues. Mais ce bar de quartier très long et étroit, en plein East Village, est surtout un terreau fertile pour le rock. « C’était un lieu d’apprentissage, raconte Lenny Kaye, guitariste de Patti Smith. Les groupes jouaient les uns pour les autres. On venait se soutenir. » Rien de glamour dans ce club : « C’était un trou à rats ! s’exclame Barbara Bucci, assistante son de 1976 à 1983. Le proprio Hilly Kristal avait des chiens lévriers persans qui faisaient caca par terre. Sans parler de la bière renversée. Un vrai cloaque. » Et d’ajouter : « Là où Hilly était super, c’est que les groupes devaient jouer leur propre musique, pas des reprises. C’était transcendant de voir les Talking Heads et Television un même soir. Ou les Ramones, Patti Smith, Blondie... Il y avait une telle énergie qu’on venait de partout pour la ressentir. David Bowie, Mick Jagger, Elvis Costello, tout musicien majeur de passage en ville se faisait un devoir de s’y arrêter. » Zaremba y met les pieds en 1975. Il vit en coloc dans un loft situé en face de la Factory de Warhol. Doué pour le dessin, il étudie à l’École des arts visuels. « Découvrir ce club a été un choc. Voir les Ramones en concert a changé ma vie. Voilà des gars qui nous ressemblaient. » 
En 1976, les jeunots du Queens y donnent leur premier concert. Ils sont quatre, ont 22 ans en moyenne. Zaremba est le chanteur, Keith Streng le guitariste, Jan Marek Pakulski le bassiste, Lenny Calderon le batteur. « On sentait qu’ils prenaient énormément de plaisir à jouer, se souvient Lenny Kaye. Et ils étaient super sympas. » Sur scène, le chanteur ne tient pas en place. Il a un tempérament mickjaggerien. Miriam Linna, ex-batteuse des Cramps, est une fan de la première heure : « Les Fleshtones ne se prenaient pas au sérieux, contrairement à d’autres. » Ensemble, ils font les 400 coups : « Un soir, Peter a trouvé une soutane dans une poubelle, dont il s’est vêtu, dit-elle en riant. On s’est fait accoster par un gang. L’un des lascars était persuadé que Peter était curé. Il lui a demandé de le bénir. Ce qu’il a fait ! » Et ils écument les clubs : « On adorait danser. Impossible de danser au CBGB ni au Max’s Kansas City où il y avait des petites tables et des chaises. Alors, on s’est mis à fréquenter toute une gamme de boîtes homos – plus ou moins glauques – qui envoyaient du très bon disco. C’étaient les seuls endroits où aller à l’époque. » « J’adorais ce qui est absurde, excentrique, démesuré », résume Zaremba, dont les adresses de prédilection étaient le 220 Club (« pas une nuit dans ce club de travelos, plein de sosies de Liza Minnelli et Diana Ross, sans une descente de police »), le Crisco Disco (« la cabine du DJ ressemblait à un pot géant de Crisco, substitut du beurre dans la pâtisserie, utilisé comme lubrifiant »), et le célèbre Studio 54 (« le paradis ! »). L’énergie qu’il puise dans ces clubs, le chanteur veut la restituer dans ses concerts : qu’on y chante, crie, danse, et qu’on s’amuse. Mais ce rock-là est snobé : « On a grandi avec les Yardbirds et le rhythm’n’blues. Certes, on avait un côté brut. Si on joue sur une scène, c’est pour donner envie de se trémousser, insiste Zaremba. Et puis, on n’avait pas de légende noire. On n’était pas des camés. Alors on nous prenait pour un groupe de twist. »
Après une flopée de concerts au CBGB, au Max’s Kansas City, au Mudd Club, le chanteur tombe sur le Club 57, au sous-sol d’une église polonaise, dans East Village. Certains soirs, un ciné-club projette des films d’horreur. Sitôt que les Fleshtones y introduisent le rock, ils attirent toute une faune de musiciens, d’artistes, de curieux, l’endroit devient vite très branché. Tout ça, c’est la nuit. Le jour, le chanteur n’a pas de quoi payer sa scolarité à l’École des arts visuels, qu’il ne prend pas très au sérieux. Il enchaîne les petits boulots : il collecte des déchets chimiques : « Le patron de la boîte me disait de les mettre à la poubelle ! Une fois, j’ai vidé une bouteille de produit toxique dans la rue. Le liquide a pris feu sur le trottoir  ! » Il devient assistant chez Farrar, Straus and Giroux, fameuse maison d’édition : « Ils donnaient de belles fêtes, avec Joan Didion et d’autres écrivains en vue. » Ou encore manœuvre dans un grand chantier : « L’artiste Frank Stella voulait détruire un vieil immeuble en briques rouges pour construire l’atelier de ses rêves. J’ai fait ça avec les Fleshtones. »
Et c’est de France que vient la reconnaissance du groupe. En 1982, les New-Yorkais y débarquent après une tournée catastrophique en Angleterre. « Imaginez un concert devant cinq spectateurs, l’un d’entre eux monte sur scène, se plante devant vous et fait un double doigt d’honneur », sourit Zaremba. À Paris, l’ambiance est tout autre : le Palace, temple de la fête, est plein à craquer. Le concert est filmé pour l’émission « Les Enfants du rock », et la première partie est assurée par les Dogs. « C’était la grosse fiesta ! », lance Tony Truant, guitariste du groupe mythique. « On pensait qu’ils allaient devenir les prochains Rolling Stones », s’enflamme le photographe Youri Lenquette, qui officiait en tant que maître de cérémonie. « Pour la première fois en six ans, on nous disait que notre musique valait quelque chose », confie Zaremba. Le concert se poursuit dans la rue. L’euphorie est telle que les Hells Angels escortent les Boys à travers la foule. Les Fleshtones, c’est un rock survitaminé, dansant, spontané, et marrant : « Il fallait voir Peter, tel un chef de fanfare au carnaval de La Nouvelle-Orléans, conduire le public après le concert, le long du boulevard », rit Carlos Grasso, ancien directeur artistique de I.R.S. Records. Encore éberlué, l’ancien tourneur Olli Barbé se souvient : « En plein milieu d’un show à L’Élysée-Montmartre, Peter fait signe à tout le monde de sortir dans la rue. Une fois dehors, il ramène tout le monde à l’intérieur. Y compris les passants ! » Lenny Kaye, guitariste de Patti Smith, revoit encore le groupe sortant de scène côté public puis, arrivé dans la rue, sautant dans un bus pour y continuer le concert.
En 1984, le chanteur devient une figure du petit écran. Il présente « The Cutting Edge », sur MTV, la chaîne musicale qui révolutionne la télé. Merci Miles Copeland, manager de The Police et patron de I.R.S. Records. Lequel a signé les Fleshtones et décroché ce créneau. Zaremba se rend alors à Los Angeles une fois par mois. « Parfois, il prenait un avion après l’un de ses concerts et arrivait, les yeux explosés. Mais il ne s’est jamais montré difficile », se souvient Carlos Grasso, promu producteur de l’émission et qui ne tarit pas d’éloges pour son présentateur. « Devant la caméra, Peter est un vrai entertainer. Il présente bien, ne manque pas d’ironie, connaît l’histoire de la musique sur le bout des doigts. » L’émission innove, avec des cadrages bizarroïdes. Nick Cave, R.E.M., les Red Hot Chili Peppers ou Madonna y font leur première télé. Iggy Pop répond aux questions de l’intervieweur, perché en haut d’un arbre, DMZ à l’arrière d’un pick-up roulant à Hollywood, Tom Waits dans son resto préféré… « Combien de fois je me suis pincé pour m’assurer que je ne rêvais pas ! Je côtoyais souvent mes idoles ! » Après les tournages, Zaremba donne des fêtes géantes au Tropicana Motel, ancien repaire des Doors. Les invités découvrent avec stupéfaction des poubelles remplies de Blue Whale, le fameux cocktail.
Le chanteur n’a pas le temps de souffler. En face de chez lui à East Village, le Pyramid Club est une sorte de Cabaret Voltaire. « La première chose qu’on voyait en entrant, c’étaient les drag-queens danser sur le comptoir du bar », s’esclaffe Jody Kurilla, ex-cheville ouvrière de l’endroit. « C’était punk, gay, hétéro, rock’n’roll », décrit John Kelly, artiste drag qui interprétait aussi bien Maria Callas que la Joconde. En 1986, les Boys accompagnent en musique le British Ian McKellen, qui déclame du Shakespeare, lors du dernier épisode de « Fifteen Minutes », l’émission télé de Warhol. Après, ils amènent l’acteur au club : « Il est resté dix minutes ! Trop exubérant pour lui », rigole Zaremba. Les Fleshtones sont comme chez eux. Keith Streng engage des groupes pour les concerts du jeudi soir. Zaremba monte un projet solo, Love Delegation. « Peter était un lanceur de mode, raconte Kurilla. Il a fait partie de ceux qui, au Pyramid, ont imaginé la création de Wigstock, le festival drag annuel devenu légendaire. » Pourquoi ça n’a pas marché très fort pour les Fleshtones ? Ils ont le feu, l’enthousiasme, la passion… et l’art de se tirer une balle dans le pied. Voyez Speed Connection. Un projet un peu fou qu’a imaginé, en 1985, Henry Padovani, ex-bassiste de The Police devenu directeur de l’international à I.R.S. Records. Son idée : un disque live. Sa trouvaille : programmer les New-Yorkais au Gibus durant deux semaines, les enregistrer la première semaine, avoir le disque prêt pour la semaine suivante, puis le diffuser en France et en Europe en même temps. Du jamais vu ! Mais voilà : « Peter nous a plantés, s’exclame Padovani. Il venait de se marier et avait fait la java. Il n’avait plus de voix ! » Le chanteur arrête de fumer, de boire, met du miel dans sa tisane, rien à faire. « Les deux premiers soirs étaient à chier. Le troisième, pas mal. C’est celui qu’on a gardé. Peter chantait de mieux en mieux, mais je devais filer à Amsterdam, à l’usine de pressage. L’opération était millimétrée. » Et ça marche : le Gibus affiche complet, des journalistes viennent de partout, les 45 000 exemplaires sont vendus. « On a réussi à créer l’urgence. Mais le disque est mauvais ! » Version de Zaremba : il avait une laryngite.

À Paris, le concert se poursuit dans la rue. L’euphorie est telle que les Hells Angels escortent les Boys à travers la foule.

Une autre expérience a tourné au vinaigre : à Decazeville, dans l’Aveyron, en 1987. « On s’en excuse encore ! ricane Keith Streng. Au moment où le rideau s’est ouvert, Gordon, le saxo, était train d’étrangler Peter avec le pied du micro. Les spectateurs pensaient que ça faisait partie du show. » Bousculade, baston. Le chanteur lance le pied de micro sur la table de mixage, Gordon balance au sol son saxophone, qui éclate en morceaux. Durée du concert : vingt minutes. Puis, le tourneur et sonorisateur, un vétéran du Viêtnam frappadingue, embarque le saxophoniste, tout aussi perché, et file avec la camionnette. « Les Hells Angels nous ont récupérés, se rappelle Bill Milhizer, le batteur. Puis, ils sont allés chercher les deux gugusses et la camionnette. Sympa ! » À l’époque, les Fleshtones sont jeunes et déchaînés. Le leader carbure à l’alcool et à l’acide, même s’il assure avoir toujours su s’arrêter. Les drogues dures ? Pas son truc : « L’héroïne était partout. Quand j’ai vu ce que ça faisait aux musiciens que je connaissais, ça m’a fait peur. » Ils ne sont pas très fiables : « Une fois, Peter nous a fait faux bond, se souvient Robert Singerman, manager de 1982 à 1987. Elliott Murphy l’a remplacé lors d’une tournée en Italie. » « Certes, il y a les excès, mais les Fleshtones n’étaient pas plus rock’n’roll que les autres, estime leur ancien manager. Pour qu’un groupe cartonne, il faut qu’une maison de disques investisse une fortune. Ça n’est jamais arrivé alors qu’ils avaient de supers chansons. Et si j’ai adoré travailler avec eux, j’étais seul. R.E.M., par exemple, a trois managers. Et puis, contrairement à des groupes comme les Rolling Stones, obsédés par le succès, les Fleshtones ne l’étaient pas. » Ce que confirme Zaremba : « On était ingérables et on ne voulait pas être managés. » Aux opportunités flinguées, s’ajoute la malchance : Pakulski, le bassiste devenu héroïnomane, quitte le groupe. I.R.S. Records les jette. Le « Cutting Edge » s’arrête. Les gros problèmes d’argent recommencent. Et les petits boulots reprennent : de déménageur à mécano en protection-incendie, en passant par agent de réservation à Air France. « Je pourrais écrire un bouquin avec tous les boulots de merde que j’ai faits », ironise Zaremba. À quelques exceptions près, comme ce job de critique gastronomique à Time Out : « Ma première chronique, c’était sur une cantine que tenaient des dames dominicaines dans un vieil autobus scolaire dans le Bronx. J’y mangeais quand j’étais dans les parages pour un travail de plomberie. »
« Les Fleshtones, ce n’est pas juste un groupe », souligne Ken Fox, le bassiste depuis 1991, succédant à Andy Shernoff, des Dictators, et Fred Smith, de Television, ayant assuré l’intérim. « Pour nous qui bossons tous à côté, c’est un besoin vital. » Hormis les années covidées, les tournées n’ont jamais cessé. Classe éco, hôtels pas chers, les petits gars du Queens ne se plaignent pas. Toujours ravis de voyager. « Peter veut tout visiter, sourit Keith Streng. Ado, il lisait des bouquins d’histoire plutôt que de jouer au baseball. Sur la route, il a une carte à la main. Tiens, si on s’arrêtait à la cathédrale de Chartres ? Et si on faisait un détour par Conques ? » Le soir, ils se donnent à fond : Zaremba a la bougeotte, Keith Streng saute en l’air comme un ado surexcité et, avec Ken Fox, fait des chorégraphies parodiques. Tous vont et viennent dans le public. Seul Bill Milhizer, aux drums, est à l’abri de l’ouragan qui déferle sur scène. Une fois, à « Nulle Part Ailleurs », la fameuse émission de Canal+, le chanteur a fini sa chanson debout sur la table de Philippe Gildas et Antoine de Caunes. Tous le disent, partout où ils jouent, ils créent du lien : « Les concerts des Fleshtones sont un moyen de se reconnecter à soi, résume Lenny Kaye. Il y a quelque chose de rassurant chez eux : vous savez ce que vous allez voir et ils savent vous le donner. » Les fans deviennent des amis. Les musiciens, des complices. En France, en Espagne, en Italie... « C’est pour ça que les tournées annulées ont été si dures pour Peter, observe Ken Fox. Il a vu ce qu’était la vie sans les Fleshtones. À ce stade, ce serait dommage d’arrêter. On a dans la soixantaine. Ce sera fini bien assez tôt. » Réputés pour être dix fois meilleurs en concert qu’en studio, ils ont tout de même 23 albums à leur actif. « On n’a pas besoin de producteur, juste un ingénieur du son. On a toujours su ce qu’on voulait », dit le chanteur. Un son lo-fi, comme si le groupe jouait dans votre salon. À l’écriture, il y a le tandem Zaremba et Streng. Leur patte : des chansons courtes et des riffs simples mais imparables. Parfois, ils reprennent un vieux blues ou un titre de rock’n’roll des années 1950.

« Au fond, ce qui nous a sauvés, c’est qu’on n’a pas eu de succès. »

Par où commencer quand on n’a jamais entendu un seul de leurs albums ? Par le dernier, Face of The Screaming Werewolf (« Somerset Morning » est une pure beauté). Puis, Stocking Stuffer (les Boys revisitent Noël, et c’est génial). Allo Brooklyn, Ici Montmartre (Tony Truant et les ’Tones chantent notamment du Dick Rivers, du tonnerre !). Hexbreaker ! (culte). Et pourquoi pas, Delegation-Time de Love Delegation (histoire de capter les effluves du Pyramid Club). « Au fond, ce qui nous a sauvés, c’est qu’on n’a pas eu de succès », résume Zaremba. Pourtant, les Fleshtones sont toujours là, ne cessent de tourner, d’enregistrer, de jubiler sur scène. Ils ont influencé des kyrielles de groupes (les Beastie Boys, les Strokes), sont adulés par de grosses pointures du rock (Lenny Kaye, de Patti Smith, Clem Burke, de Blondie, Peter Buck, de R.E.M.). Ils ont marqué trois générations de fans. Certains couples se sont formés à leurs concerts, d’autres viennent désormais avec leurs petits-enfants. Et ça, pour Peter, « ça vaut tout l’or du monde. » ...

un demi-siècle de rock’n’roll avec les Fleshtones Rouillé, Peter Zaremba, le leader du mythique groupe US ? Ses prestations scéniques disent tout l’inverse ! Il s’agite, se déhanche, va au contact du public... À 67 printemps, il a gardé cette soif de vivre et de jouer intacte. Inoxydables, les Fleshtones ! Fondés en 1976 à New York, ils se sont fait remarquer par leur folle énergie sur scène, leur esprit bon enfant, leur autodérision. D’ordinaire, ces gais lurons sont en tournée en Europe où ils ont des hordes de fans, une fois par an. Covid oblige, Peter Zaremba s’est rabattu sur les deux émissions de rock qu’il anime sur SiriusXM, une radio sur le net. Et sur les chansons qu’il peaufine avec son copain Florent Barbier, -l’ex-Roadrunners, avant de les sortir en solo sur un 45 tours. Un pis-aller en attendant de sauter dans un avion pour l’Europe. La coronacrise, il la passe dans le Connecticut. Il y vit avec son épouse Marilla, peintre. Leur fils adoptif, Sergei, étudiant, est resté dans la maison familiale à Brooklyn. Sur FaceTime, l’application de visioconférence, Peter nous apparaît avec sa trombine cartoonesque : bouille joviale, petite mèche, chemise à fleurs de dandy, et un air d’éternel ado incapable de se prendre au sérieux. Quarante-six ans que ça dure, les Fleshtones ! Une exception dans le paysage du rock. S’ils n’ont jamais atteint la célébrité d’autres rockeurs de la génération CBGB, du nom du fameux club de rock new-yorkais, pas une once d’amertume. La passion de Zaremba pour la musique vient de loin, de…

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