Notre modernité avance à l’intérieur d’un fantasme : la possibilité toujours offerte de se réinventer. Les progrès médicaux, technologiques, cybernétiques ont ouvert de sérieuses brèches. Implants pour modifier sa physionomie, prothèses pour endurcir sa complexion, applications intelligentes pour nous aider à faire les bons choix. Nous nous mouvons dans un univers surdéterminé et, paradoxalement, de plus en plus incertain, où toute chose trouve son objet, sa valeur d’usage et d’échange – y compris notre propre reflet – jusqu’à la saturation totale. […]
Notre modernité avance à l’intérieur d’un fantasme : la possibilité toujours offerte de se réinventer. Les progrès médicaux, technologiques, cybernétiques ont ouvert de sérieuses brèches. Implants pour modifier sa physionomie, prothèses pour endurcir sa complexion, applications intelligentes pour nous aider à faire les bons choix. Nous nous mouvons dans un univers surdéterminé et, paradoxalement, de plus en plus incertain, où toute chose trouve son objet, sa valeur d’usage et d’échange – y compris notre propre reflet – jusqu’à la saturation totale. Se réinventer, en composant une version optimalement améliorée de soi-même, ou diamétralement opposée. Se réinventer en trouvant un, mille partenaires, pour forniquer dans des lieux impossibles (pour moi, ce serait le Louvre ou le wagon-bar d’un Paris-Lyon). Se réinventer, en devenant criminel – qui n’a jamais souhaité éprouver la sensation d’une nuque qui se brise ? –, artiste célèbre, en étant parfaitement désiré – puisque tout n’est plus que désir. Tels de grands illusionnistes, nous pouvons maintenant rendre visible, transparent et possible ce qui échappait jadis au regard. Voici l’évacuation du hasard et de l’accidentel, par le recouvrement de l’hyperréel, tout comme Baudrillard parlait d’hypertélie. Bienvenue dans le métavers. Le dernier roman de Nathan Devers, Les Liens artificiels, détonne. Parce que c’est un roman. Un vrai roman, pas un roman-récit, ni un roman-récital. C’est un roman de vraie fiction, avec une histoire inventée, celle de Julien Libérat, jeune pianiste inactuel et désabusé, faiblement productif, « quasi trentenaire enfermé dans un mode de vie digne d’un étudiant », dont le suicide en direct sur Facebook,…
La suite est reservée aux abonné(e)s
Déjà abonné(e) ? connectez-vous !