On l’a connue guitariste au sein du groupe de rock Subway avant qu’elle ne se lance, sous son seul nom de famille, en solo. Amandine Maissiat a la partition facile et la plume virevoltante. Ce dont témoigne son troisième album, Delta, qui succède aux déjà très réussis Tropiques (2013) et Grand amour (2016). La star, ici, c’est le piano, sous toutes ses formes et à travers toutes les émotions qu’il peut réveiller chez l’auditeur. En live, la mise en scène narrative promet plus de beauté encore…. En attendant, Maissiat nous confie les dix morceaux où le piano la bouleverse autant que nous.
« J’EN DÉDUIS QUE JE T’AIME »
Charles Aznavour
Au début, la main droite martelant dans les aigus, entêtante, répond au bourdon de la guitare sur lesquels viennent se poser les cordes des refrains. Le piano prend de plus en plus de place et tout devient plus large et orchestré. Cela pourrait être une très belle bande originale… ce que sont souvent pour moi les chansons que j’écoute.
« THE DEVIL » , PJ Harvey
Chanson d’ouverture de l’album White Chalk que j’ai écouté en boucle à sa sortie. Il est construit comme une grande épopée autour des pianos et des claviers. C’est par ce disque que j’ai enfin accédé à PJ Harvey. Chaque titre évoque la liberté, l’air, l’envol, le recueillement… c’est magnifique.
« VERT VERT VERT »
Véronique Sanson
Impossible de parler piano sans piocher dans l’incontournable discographie de Sanson. C’est la reine du groove ! « Vert vert vert » est une chanson peu connue dont j’adore la mélodie et le motif pianistique. Toute l’originalité et la musicalité de Sanson sont contenues dans ce petit bijou.
« UN MOMENT PARFAIT »
Philippe Katerine
Il est l’un des plus grands poètes de notre temps et cette chanson en est l’expression parfaite. Elle me provoque une forte émotion parce qu’elle remet tout et tout le monde dans le vivant. Sous ses airs de rien, elle dit tout du rapport au présent, à la vie. Je pleure à chaque fois que je l’écoute.
« DECRESCENDO »
Lomepal
En tant que fan inconditionnelle de Lomepal, j’ai été très heureuse de découvrir les arrangements de ce titre sur Mauvais ordre. Le piano y est intense, prend toute la place, dit toute la violence du cœur qui bat pour l’autre, prêt à exploser de rage, de manque et de désespoir. Puis il se calme sur les refrains où le piano recouvre toute sa douceur dans une étrange accalmie. Et, soudain, il se remet à hurler et se débattre ! À l’image du cœur amoureux.
« PRELUDE EN DO MINEUR »
Jean-Sébastien Bach par Hélène Grimaud
C’est le morceau d’ouverture du Clavier bien tempéré, qui me sidère à chaque écoute. Je suis subjuguée par la rapidité d’exécution, et la sensation varie suivant notre propre forme physique ou mentale. J’adore l’écouter dans Paris en marchant ou dans les transports, il va bien avec l’âpreté d’une grande ville, et aussi celle de l’hiver.
« PARCE QUE »
Serge Gainsbourg
Une des plus belles chansons d’amour au monde, écrite par Charles Aznavour et composée par Gaby Wagenheim. Mais c’est la version de Gainsbourg qui me bouleverse. Comme le son du piano, au bord des larmes. Cet enregistrement rare a disparu des plateformes d’écoute. Ce qui est fascinant dans cette version au piano solo, c’est qu’on revient à la racine des choses, à l’intériorité. Il n’y a plus de décor, plus d’orchestre, juste quelqu’un qui chante au creux de votre oreille, le cœur déchiré. Et c’est sublime.
« COMME JE M’ENNUIE DE TOI »
William Scheller
William Scheller a été pour moi LA leçon de piano alors que j’assistais à un de ses concerts. Une claque monumentale de composition et d’exécution. La mélodie du chant vient compléter la partition pianistique et il n’y a besoin de rien d’autre si ce n’est d’un tempo parfait. Une main gauche qui répond à la main droite ou l’inverse, c’est une langue à part entière et ce qu’il y a de plus dur à inventer.
« IT’S ALWAYS YOU »
Chet Baker
Chet Baker Sings : un de mes albums fétiches. J’adore l’écouter chanter, c’est une histoire de couleurs et de vibrations. Je trouve que toutes les fréquences se mélangent parfaitement. Celle de sa voix, celle du piano et tous les instruments qui arrivent au fur et à mesure.
« ALL I NEED »
Radiohead
In Rainbows est mon album préféré de Radiohead, avec sa chanson « House of cards » qui est pour moi un chef d’œuvre de malice et de sensualité. Ce que j’aime dans « All I Need », c’est que le piano y fait une apparition progressive, des basses à peine perceptibles au début et il faut attendre près de trois minutes pour le voir débarquer, comme une irruption. Comme si tout ce qui tentait de se contenir était tendu vers un déchainement final inévitable. J’aime quand la musique nous fait croire à cette fatalité.
Maissiat, Delta, Cinq7 . En tournée dans toute la France, et en concert le 4 mai au Bouffes du Nord, Paris 10°.