Septembre

Le mot de l’éditeur #20

William Emmanuel

À quoi sert l’école ? En réalité, plus personne ne le sait exactement. À l’origine, c’est le lieu où l’élève apprend à lire, à écrire, à compter. C’est aussi, et surtout, le lieu où il apprend à vivre avec les autres, où il doit essayer de les comprendre au lieu de les juger. En résumé, l’école doit aider le futur citoyen à remplir sa boîte à outils afin de devenir un acteur conscient de la vie démocratique de son pays. Du reste, les dictatures, en particulier religieuses, font tout pour empêcher l’enseignement. Car un citoyen éduqué sera plus difficile à contrôler, plus à même de faire jouer son libre arbitre.

Si l’éducation rend l’individu libre, elle est aussi centrale dans l’évolution d’une civilisation, offrant culture et sagesse démocratique. Sans éducation, impossible de constituer une élite capable de conduire un pays. Ce qui fit la force de la France, ce fut son système éducatif mis en place au XiXe siècle. Basé sur la méritocratie, il a permis de former des travailleurs dans tous les domaines, permettant à beaucoup de prendre l’ascenseur social. Le pays, alors dirigé par des gouvernants soucieux du long terme, a pu lancer sa modernisation, avec le réseau ferroviaire, l’électricité nucléaire, l’aéronautique et le spatial, la téléphonie, etc.

Les grands dirigeants politiques savent l’importance de l’éducation pour le développement d’un pays. Un exemple : si l’Inde est devenue l’un des champions de l’informatique mondiale, c’est parce que le Premier ministre Jawaharlal Nehru a initié le réseau des Indian Institute of Technology (IIT) pour doter dès 1950 le pays de ses propres ingénieurs après la fin de la colonisation britannique. C’est aujourd’hui une pépinière qui alimente tout le système technologique occidental, notamment américain.

En France, il n’y a plus aucune vision de long terme. Pire, une ségrégation s’est installée, avec d’un côté des familles aisées et connectées qui peuvent mettre leurs enfants dans les meilleures écoles dès le plus jeune âge, afin de leur garantir une place au sein de l’élite politico–économique, et de l’autre l’immense majorité de la population qui doit se contenter d’un système éducatif laissé à l’abandon – salles de classe indignes, programmes bâclés, orientation déficiente – malgré les nombreuses « réformes » qui n’ont d’autre objectif que de permettre à des ministres de croire qu’ils laisseront une trace. Résultat : la France décline dans les classements mondiaux, ses élèves lisant moins bien, comptant moins bien, etc. En outre, durant le confinement imposé lors de la pandémie de covid, les étudiants, dont beaucoup vivent de petits boulots, ont été totalement délaissés et ont dû quémander une aide alimentaire auprès d’associations ou de particuliers.

Quel est l’avenir d’un pays qui se soucie aussi peu de l’éducation et de la formation de sa jeunesse ? La France veut-elle imiter les États-Unis, qui compensent la médiocrité de leur système éducatif par l’importation de talents venus d’ailleurs, en particulier d’Europe et d’Asie ? Non, elle veut juste pérenniser la reproduction des élites, comme sous l’Ancien Régime. Un tel choix n’est pas sans risque pour la cohésion du pays. C’est la raison pour laquelle il est urgent de réunir toutes les bonnes volontés pour refonder l’école.



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