Jonathan Glazer avait disparu des écrans depuis 2013, depuis son Under the Skin formidablement dérangeant, fable fantastique avec Scarlett Johansson transformée en extraterrestre chargée de faire disparaître les hommes. Enfermée dans une armure d’insensibilité, Johansson noyait littéralement les hommes dans un océan de noirceur et ce film s’aventurait, déjà, dans la zone trouble entre la cruauté ordinaire et l’étincelle d’empathie. Déjà, car dix ans plus tard, Jonathan Glazer revient avec La Zone d’intérêt, Grand Prix au dernier festival de Cannes, nouvelle […]
Jonathan Glazer avait disparu des écrans depuis 2013, depuis son Under the Skin formidablement dérangeant, fable fantastique avec Scarlett Johansson transformée en extraterrestre chargée de faire disparaître les hommes. Enfermée dans une armure d’insensibilité, Johansson noyait littéralement les hommes dans un océan de noirceur et ce film s’aventurait, déjà, dans la zone trouble entre la cruauté ordinaire et l’étincelle d’empathie. Déjà, car dix ans plus tard, Jonathan Glazer revient avec La Zone d’intérêt, Grand Prix au dernier festival de Cannes, nouvelle exploration de la frontière entre l’humain et l’inhumain, lorsque la banalité d’un quotidien dévoile la banalité même du mal. Le film est l’adaptation du roman éponyme de Martin Amis qui relate la vie familiale de Rudolf Höss, commandant en chef d’Auschwitz et l’un des exécutants les plus zélés de la solution finale. Comment représenter l’horreur des camps ? La question hante cinéastes, penseurs et critiques depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Comment montrer l’innommable ? Comment mettre en scène cette banalité du mal théorisée par Hannah Arendt ? Ce concept, la philosophe l’a développé après avoir couvert, pour The New Yorker, le procès d’Adolf Eichmann, où sera révélé aux yeux de tous qu’Eichmann, architecte et maître d’œuvre de la solution finale, n’est en aucun cas un monstre au sens généralement accepté – c’est-à-dire un homme hors de la société, suffisamment exceptionnel pour n’être qu’un cas isolé – mais au contraire un fonctionnaire des plus ordinaires, capable de répéter froidement et quotidiennement des actes abominables. Ce bouleversement des notions mêmes de mal et de bien, soutenu…
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