« Le Marcel Proust du Moyen Âge nippon » : c’est en ces mots que Marguerite Yourcenar elle-même louait l’écrivaine Murasaki Shikibu (973-1014, date de décès la plus communément admise, ou 1025) et son roman Le Dit du Genji, aujourd’hui considéré comme l’œuvre la plus emblématique de la littérature classique du Japon. Des estampes aux sculptures en passant par les kimonos, le roman aura durablement influencé l’iconographie japonaise et internationale – une créativité unique que met à l’honneur le musée Guimet, dans le 16ème arrondissement de Paris
La visite commence par une mise en contexte bienvenue, à l’aide de panneaux explicatifs éclairants. L’occasion de comprendre le paradoxe de la condition féminine de l’époque : mises à l’écart de la vie politique, les femmes ont tout le loisir de l’observer et de la décrire. C’est dans ce contexte que Murasaki rédige son roman, qui deviendra vite célèbre – en témoignent les mille et une pièces d’ornement et de mobilier somptueuses qui s’en inspireront, et dont bon nombre nous sont données à voir ici.
Une expérience tangible et vivante
Si chaque étape de l’exposition a son intérêt, c’est sans doute sa deuxième partie qu’on conseillera aux non-initiés de privilégier : la première met en avant des objets très spécifiques (écritoires, palanquins), avec un lien assez lointain au texte de Murasaki. Mais la suite vaut la peine d’être vue : outre de magnifiques rouleaux tirés du manuscrit original, l’exposition propose une expérience tangible et vivante – on retiendra la salle remplie d’échantillons de parfums cités dans le roman, ou celle recouverte de planches des mangas qui s’en inspireront. La visite s’achève sur un passage sublime du livre, parfait exemple de sa peinture minutieuse des tourments de la vie amoureuse.
En bref, c’est sans nul doute une riche et belle expérience que propose le musée Guimet jusqu’au 25 mars 2024 ; à la fois dense (1 h 30 environ) et relativement accessible, qui plongera ou replongera le visiteur dans l’univers mystérieux et fascinant du Japon médiéval.
À la cour du prince Genji, musée Guimet (6 place d’Iéna, Paris 75116), jusqu’au 25 mars 2024.