Sang pour sang

Québec, la guerre des motards

Stéphane Berthomet

Dans les années 1990, les Hells Angels lancent dans la province canadienne un conflit d’une brutalité inédite, sur fond de trafics en tous genres. Une vague d’atrocités qui a fait plus d’une centaine de morts et marqué durablement la société.

 

C’est le point culminant d’une incroyable série d’actes violents. Il survient le 9 août 1995, à 12h30. Ce jour-là, une déflagration assourdissante retentit à Hochelaga-Maisonneuve, un quartier populaire de Montréal. Une bombe dissimulée sous une Jeep garée en pleine rue vient d’exploser, tuant sur le coup son occupant, projeté à plusieurs mètres de son véhicule avec les deux jambes arrachées. Des morceaux de la voiture sont projetés à plus de 50 mètres de distance. Le jeune Daniel Desrochers, 11 ans, qui jouait sur le terrain d’une école toute proche, reçoit un projectile en métal en pleine tête. Il meurt de cette blessure après quatre jours passés à l’hôpital.

Aujourd’hui encore, cet attentat reste, dans l’esprit des Québécois, l’acte le plus emblématique de la violence aveugle d’une décennie sanglante, ayant abouti à plus de 150 morts, une centaine d’incendies criminels et 200 tentatives de meurtres. Près de trente années plus tard, les soubresauts de ces attentats se font encore sentir. Car ce qui était considéré, au moment des arrestations qui ont suivi cette vague de violence, comme un succès policier s’est finalement révélé être un véritable fiasco judiciaire. Les opérations policières de grande envergure, et ce qu’on a ensuite appelé les «mégaprocès», se sont finalement soldés par des peines réduites, des acquittements et des dizaines d’arrêts de procédures en raison de délais déraisonnables.

Les condamnations obtenues grâce aux témoignages de délateurs et de repentis, grassement rémunérés et protégés par la justice pour dénoncer leurs complices, ont conduit, quelques années plus tard à la création de l’Association des témoins spéciaux du Québec par les criminels, qui se sont ensuite estimés «utilisés» et lésés par les ententes signées à l’époque. Et, comme si cela ne suffisait pas, plusieurs membres en règle des Hells Angels se sont à leur tour tournés vers les tribunaux pour poursuivre la Direction des poursuites criminelles et pénales, des procureurs et certains délateurs, en alléguant que les autorités avaient volontairement caché des preuves essentielles à leur défense.

Pour comprendre cette guerre contre le crime organisé, commencée dans les rues de Montréal au début des années 1990 et qui se poursuit encore aujourd’hui dans les prétoires et les cours de justice, il faut remonter à l’Amérique de l’après-guerre. Sur les routes de Californie souffle alors un vent de liberté avec intensité. Parmi les groupes de motards qui traversent le pays en portant fièrement leurs blousons de cuir, certains se démarquent rapidement. Ces hommes, dont beaucoup sont d’anciens militaires, sont marqués par les horreurs de la guerre. Ils recherchent alors une forme de fraternité, qui leur rappelle certainement l’esprit de solidarité qu’ils ont connu au combat. Les week-ends et les jours de fête, des groupes de dizaines à plusieurs milliers de motards sillonnent le pays et se livrent à des courses de moto sur les routes ou les circuits. Lorsque surviennent les premiers incidents entre certains groupes de motards, l’American Motorcyclist Association explique que les fauteurs de trouble ne représentent que 1%  des motocyclistes.

C’est de cette déclaration que va naître le concept et l’écusson du «un pour cent», qui ornera ensuite la veste de cuir des Hells Angels, signifiant au monde qu’ils représentent le 1% des motocyclistes, ceux qui vivent en marge de la société et de ses règles. Le 17 mars 1948, le premier «chapitre» (une section dans le jargon de l’organisation) des Hells Angels, un nom qui tire ses origines du passé d’aviateurs de plusieurs de ses membres, est fondé à San Bernardino, dans la banlieue de Los Angeles.

Au Québec, c’est une organisation de motards locale, les Popeyes, qui sévit depuis les années 1960 dans la région de Montréal et dans différentes villes le long du fleuve Saint-Laurent. Dans la province anglophone de l’Ontario, on trouve des groupes aux noms tout aussi évocateurs: les Devil’s Disciples et les Satan’s Choice. Dès la fin des années 1960, les motards québécois se spécialisent dans la vente de produits stupéfiants, en particulier la méthamphétamine, communément appelée «speed». Les laboratoires clandestins fleurissent ici et là dans les vastes campagnes de la province. La drogue est principalement destinée à la vente dans tout le Canada et aux États-Unis.

C’est en 1977 que les Hells Angels débarquent au Québec. Après d’intenses négociations, les Popeyes acceptent en effet de passer sous la coupe de l’organisation américaine et de fonder le premier chapitre canadien des Hells. La cadence s’accélère: les motards s’installent rapidement dans le paysage criminel québécois. Des petits groupes de motards locaux, comme les Night Angels, les Gitans et les Missiles, sont assimilés de gré ou de force à l’organisation, qui ne cesse de prendre de l’importance. Mais les nouveaux membres manquent parfois de discipline. Ils ont du mal à se plier aux règles très strictes mises en place par les fondateurs du mouvement aux États-Unis.
 

Dès la fin des années 1960, les motards québécois se spécialisent dans la vente de produits stupéfiants, en particulier la méthamphétamine.
 

En 1982, deux membres sont exécutés pour avoir mis en danger les relations avec un chef de gang, un important partenaire dans le trafic de drogue. Ce rappel des règles – pas de vol entre motards, pas de viol et pas d’usage de drogue – ne semble pas avoir été compris par tout le monde. Trois ans plus tard, en 1985, c’est une véritable purge qui a lieu au sein du mouvement avec la «disparition» complète du chapitre de Laval: à l’occasion d’une fête organisée pour détourner l’attention, des membres indisciplinés de cette section, connus pour leur consommation de drogue, sont tout simplement assassinés par les membres d’un autre chapitre et leurs corps jetés dans le fleuve, enveloppés dans des sacs de couchages lestés avec des blocs de ciment. Plusieurs macchabées seront découverts par les policiers dans les jours et les semaines qui suivent. Le «massacre de Lennoxville» devient ainsi le symbole de la brutalité du monde des motards criminalisés au Québec.

À la fin des années 1980, le paysage criminel de la province subit une profonde transformation. La place de plus en plus importante occupée par les Hells Angels suscite des vocations et de plus en plus de candidats se présentent à titre de prospects. Parmi eux se trouve un nommé Maurice Boucher. Né le 21 juin 1953 dans une région tranquille non loin de l’estuaire du Saint-Laurent, la Gaspésie, Boucher est l’aîné d’une famille de huit enfants. Ses parents, fuyant une pauvreté rurale pour une autre, plus urbaine, s’installent à Montréal, dans le quartier ouvrier de Hochelaga-Maisonneuve. Maurice entretient des rapports conflictuels avec son père, un ferrailleur sans emploi, alcoolique et violent. Il quitte rapidement l’école et tombe dans la criminalité, commettant vols et cambriolages en série.

 
À la tête des Rockers, Maurice Boucher établit des liens avec la mafia. Sous sa direction, le Québec est le théâtre d’une violence inédite.
 

Dans la vingtaine, Maurice Boucher vend de la drogue pour se payer ses propres doses et fait partie de la petite faune délinquante du quartier d’Hochelaga-Maisonneuve. Puis en 1982 il rejoint un gang de motards suprémacistes blancs, les SS, et fait ses premiers pas dans une organisation criminelle structurée. Boucher devient vite un homme craint et respecté. Il fait preuve d’un certain charisme et d’une capacité de leadership qui marqueront ensuite son ascension dans l’univers du crime. Sa violence est notable. Il est décrit comme un homme qu’on envoyait pour en tabasser d’autres, souvent sous l’emprise de la drogue. Mais les policiers de l’époque notent aussi qu’il fait preuve d’une ambition dévorante, et qu’il est déterminé à grimper les échelons de la pègre.

Sa rencontre avec Salvatore Cazzetta, autre membre influent des SS, marque d’ailleurs le début d’une amitié solide et stratégique. Ensemble, ils deviennent des candidats de choix pour les Hells Angels cherchant à étendre leurs activités au Canada. Mais Cazzetta refuse de rejoindre les Hells et fonde un nouveau club nommé les Rock Machine en 1986. Leurs chemins se séparent alors. Et Boucher devient membre en règle des Hells Angels. Son évolution au sein du mouvement est rapide: repéré par Walter Stadnick, chef des Hells canadiens en 1988, Boucher est choisi comme lieutenant pour la province du Québec en raison de son potentiel. Il démontre rapidement ses compétences. Lui revient alors la tâche de former des alliances, d’organiser les trafics et de consolider le pouvoir du club au Québec.

Le parcours de Maurice Boucher dans le monde des motards hors-la-loi ne fait que commencer. Il décide de fonder en 1992 un nouveau groupe de motards, les Rockers, destiné à être l’école de formation des Hells Angels. Dès 1993, Boucher établit des liens avec la mafia pour la toute première fois dans l’histoire du crime organisé. C’est à cette époque qu’il se voit attribuer le surnom de «Mom» («Maman»), soulignant son rôle d’observateur vigilant et de leader omniprésent parmi ses hommes et son organisation.

Mais c’est aussi sous sa direction que, dans le milieu des années 1990, le Québec devient le théâtre d’une escalade de violence jamais atteinte, avec en son cœur la guerre impitoyable entre deux gangs rivaux de motards. D’un côté, les Hells Angels, dirigés par Maurice Boucher. Et de l’autre, les Rock Machine de Salvatore Cazzetta, l’ancien ami de Boucher. Ces deux factions se disputent le contrôle des territoires pour le trafic de drogue. L’arrestation de Cazzetta bouleverse alors la situation et Boucher, toujours prompt à agir, saisit cette occasion pour tenter de prendre l’ascendant sur les Rock Machine. Le 14 juillet 1994, deux membres des Rockers assassinent un proche des Hells, marquant le début d’une guerre sanglante et impitoyable qui va durer près de huit ans.

Cette confrontation, connue sous le nom de «guerre des motards», constitue l’une des pages les plus sombres et les plus violentes de l’histoire du crime organisé canadien. Les attaques orchestrées par Boucher sont méthodiques, délibérées et brutales. Elles visent à affaiblir et éradiquer les Rock Machine et toutes les autres bandes qui les soutiennent. Cette guerre urbaine atteint son paroxysme le 9 août 1995 lors de l’explosion de la Jeep dans le quartier Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, atteignant tragiquement le jeune Daniel Desrochers.

La mort de l’enfant submerge la province d’émotion. Révoltée par cet acte de violence gratuit, la population réclame une action policière. Le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal mobilise alors une équipe de 30 inspecteurs pour enquêter sur cette vague de violence. Ces policiers collaborent avec la Sûreté du Québec au sein d’une nouvelle escouade nommée «Carcajou», en référence à l’animal réputé au Canada pour sa force, sa férocité et sa vivacité. En 1997, une loi antigang est promulguée, révolutionnant le système judiciaire. Désormais, la simple implication dans les affaires d’une organisation criminelle peut conduire un individu derrière les barreaux pour une période pouvant aller jusqu’à quatorze ans. Cette nouvelle législation offre un outil puissant aux policiers pour démanteler ces groupes. On élargit aussi le recours aux informateurs et aux délateurs: des criminels qui signent des ententes avec la justice en échange de leurs informations et témoignages.

 
Acquitté, Boucher ne semble plus perçu comme un criminel mais comme une figure emblématique et mythique.
 

Mis en cause dans plusieurs dossiers, Boucher est arrêté en 1995, mais il est relâché faute de preuves. En 1997, on franchit un nouveau stade dans la violence, lorsque des membres des Hells Angels assassinent deux gardiens de prison, Diane Lavigne et Pierre Rondeau, et en blessent un troisième, Robert Corriveau. Les soupçons se portent immédiatement sur Boucher, dont on dit que la paranoïa le pousse à s’en prendre aux autorités. Le 2 novembre 1998, il est jugé pour l’attaque contre les gardiens de prison. Les accusations reposent sur les déclarations de Stéphane Gagné, un repenti et ancien tueur à gages proche de Boucher. Gagné a été impliqué dans le meurtre de la gardienne de prison Diane Lavigne et dans la tentative de meurtre sur Robert Corriveau. Après son arrestation, Gagné a rapidement collaboré avec la police et son témoignage est devenu la pièce maîtresse de l’accusation contre Boucher. Il est par la suite devenu un témoin protégé par la police et vit sous une nouvelle identité. Malgré certaines zones d’ombre quant à la façon dont Boucher aurait ordonné les meurtres, le juge du procès, Jean-Guy Boilard, mène les débats avec fermeté. Cependant, à la surprise générale, le verdict tombe le 27 novembre: Boucher est acquitté. La salle d’audience est secouée par cette décision.

Les policiers, les magistrats et les autorités dans leur ensemble sont déconcertés et stupéfaits de ce revirement inattendu. Maurice Boucher s’est imposé comme le vainqueur incontesté de cette bataille judiciaire. Le soir même, il fait une entrée triomphale dans une immense salle de sport où se déroule un combat de boxe. Il est acclamé par une partie du public. Étonnamment, à la suite de cet incroyable épisode judiciaire, il ne semble plus perçu comme un criminel mais comme une figure emblématique et mythique. Chaque apparition de Boucher dans les rues de son quartier d’Hochelaga-Maisonneuve est pour lui l’occasion d’évaluer sa cote. Son statut de «héros populaire» suscite autant d’interrogations que de fascination. Loin de prendre du recul face au vacarme au cœur duquel il se trouve, à peine libéré de prison, Boucher fait à nouveau éliminer ceux qui refusent encore de se soumettre à son autorité.

Les règlements de comptes se poursuivent ainsi jusqu’au début des années 2000 lorsque, réalisant enfin que cette guerre est très mauvaise pour les affaires, les Rock Machine et les Hells Angels finissent par enterrer la hache de guerre. Et c’est encore une fois Mom Boucher qui l’emporte: les Rock Machine acceptent de se soumettre aux Hells Angels, qui prennent alors le contrôle de tout le marché de la drogue à Montréal. Cependant, la victoire de Boucher est éphémère. Le 10 octobre 2000, son procès pour le double meurtre des gardiens de prison est annulé par la cour d’appel de Montréal. La police a en effet découvert que des membres du jury ont fait l’objet d’intimidation et que le juge aurait donné des directives non conformes aux jurés durant les audiences. Boucher est de nouveau appréhendé. En mars 2001, une vaste opération policière aboutit à l’arrestation de 142 personnes liées au crime organisé et aux motards, principalement des Hells Angels ou des membres de leurs groupes affiliés. Les autorités infligent alors un coup sévère à l’organisation de Boucher et l’empire qu’il avait édifié commence à s’effondrer. C’est finalement à l’issue d’un procès très médiatisé, en 2002, que Mom est condamné à la réclusion à perpétuité pour trois chefs d’accusation: une tentative de meurtre et deux meurtres au premier degré. Cette sentence est perçue par beaucoup comme une victoire majeure dans la lutte contre le crime organisé au Québec. Boucher est incarcéré dans la prison à sécurité maximale de Sainte-Anne-des-Plaines. Sa vie en détention est tout sauf tranquille. Il est visé par plusieurs tentatives d’assassinat, notamment de la part de membres de gangs ennemis des Hells Angels.

En 2009, une nouvelle opération policière vise le milieu des Hells. L’opération permet la confiscation de nombreux biens et actifs de l’organisation. Au sein de la mouvance criminelle, des voix s’élèvent pour la première fois contre Boucher, tenu pour responsable des assauts répétés de la police et de la justice. Sa stratégie de la guerre totale est, à juste titre, vue par beaucoup de membres importants de l’organisation comme la cause de l’acharnement des autorités. La véritable surprise viendra de son exclusion du mouvement des Hells Angels en 2014, par les membres de son propre clan, marquant ainsi le début de disgrâce et la fin de son parcours au sein des motards du «1%». Sa descente aux enfers est alors vertigineuse, passant du statut de figure dominante du crime organisé à celui de détenu menacé de mort. Se retrouvant seul, éloigné de l’organisation qu’il a largement contribué à faire prospérer, Boucher décède en prison le 10 juillet 2022, des suites d’un cancer de la gorge.

Bien entendu, son éviction puis son décès ne signifient pas pour autant la fin des activités des Hells Angels. De nouveaux dirigeants émergent pour lui succéder et garantir la pérennité des activités criminelles, tout en diversifiant leurs investissements dans des secteurs légaux. Les Hells Angels s’adaptent aux nouvelles règles du milieu criminel. Ils se font plus discrets. Même s’ils continuent à porter les vestes ornées du fameux « 1% », ils envoient sur le devant de la scène leurs avocats en costume de ville. Ceux-ci se chargent d’attaquer le système d’une façon nouvelle et plus moderne, sur son propre terrain. Bien loin des meurtres d’agents du gouvernement ou des bombes, comme celle qui tua Daniel Desrochers.

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Dans les années 1990, les Hells Angels lancent dans la province canadienne un conflit d’une brutalité inédite, sur fond de trafics en tous genres. Une vague d’atrocités qui a fait plus d’une centaine de morts et marqué durablement la société.   C’est le point culminant d’une incroyable série d’actes violents. Il survient le 9 août 1995, à 12h30. Ce jour-là, une déflagration assourdissante retentit à Hochelaga-Maisonneuve, un quartier populaire de Montréal. Une bombe dissimulée sous une Jeep garée en pleine rue vient d’exploser, tuant sur le coup son occupant, projeté à plusieurs mètres de son véhicule avec les deux jambes arrachées. Des morceaux de la voiture sont projetés à plus de 50 mètres de distance. Le jeune Daniel Desrochers, 11 ans, qui jouait sur le terrain d’une école toute proche, reçoit un projectile en métal en pleine tête. Il meurt de cette blessure après quatre jours passés à l’hôpital. Aujourd’hui encore, cet attentat reste, dans l’esprit des Québécois, l’acte le plus emblématique de la violence aveugle d’une décennie sanglante, ayant abouti à plus de 150 morts, une centaine d’incendies criminels et 200 tentatives de meurtres. Près de trente années plus tard, les soubresauts de ces attentats se font encore sentir. Car ce qui était considéré, au moment des arrestations qui ont suivi cette vague de violence, comme un succès policier s’est finalement révélé être un véritable fiasco judiciaire. Les opérations policières de grande envergure, et ce qu’on a ensuite appelé les «mégaprocès», se sont finalement soldés par des peines réduites, des acquittements et des dizaines…

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