Deux documentaires de Mehran Tamadon relatant, par la mise en situation, l’horreur du système iranien et des interrogatoires « idéologiques ». Projet aussi complexe qu’ambitieux : dans Là où Dieu n’est pas, le Franco-Iranien montre combien les tortures imprègnent les corps et les gestes bien après la fin des sévices ; dans Mon pire ennemi, il demande à des compatriotes réfugiés en France, ayant subi la question en Iran, de l’interroger, lui, comme leurs bourreaux l’ont fait avec eux. Après plusieurs rencontres filmées avec […]
Deux documentaires de Mehran Tamadon relatant, par la mise en situation, l’horreur du système iranien et des interrogatoires « idéologiques ». Projet aussi complexe qu’ambitieux : dans Là où Dieu n’est pas, le Franco-Iranien montre combien les tortures imprègnent les corps et les gestes bien après la fin des sévices ; dans Mon pire ennemi, il demande à des compatriotes réfugiés en France, ayant subi la question en Iran, de l’interroger, lui, comme leurs bourreaux l’ont fait avec eux. Après plusieurs rencontres filmées avec ces exilés, c’est l’actrice Zar Amir Ebrahimi – prix d’interprétation féminine à Cannes en 2022 pour Les Nuits de Mashhad – qui happe par son magnétisme le réalisateur, la caméra et le spectateur, à la fois solidement enracinée dans le présent et un peu absente, encore là-bas, avec ses tortionnaires. Ebrahimi, qui a été questionnée en Iran, endosse le rôle de l’inquisitrice – rôle, car la frontière entre fiction et documentaire devient vite floue, tant les contours de la geôle, de l’interrogatoire imaginé, nous emmènent peu à peu sur le territoire du vrai-faux, ou du faux-vrai – à mesure qu’elle se mue en ce bourreau qu’elle a connu. Ce dangereux mais fascinant renversement montre la responsabilité de celui qui exerce un pouvoir total, ici protégé par un jeu cinématographique qui lui permet de laisser libre cours à toutes ses parts d’ombres ; tout comme la capacité d’une personne, même ancienne victime, à se transformer en bourreau. Un point de bascule si subtilement amené que la mue du film s’opère également dans le regard du spectateur. Peu…
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