En démocratie, le peuple exerce le pouvoir. En principe. En réalité, le système de représentation conduit à concentrer le pouvoir entre les mains d’une poignée de personnes qui animent le gouvernement et le Parlement. Si ces représentants ont une conscience aigüe de leur responsabilité à l’égard des citoyens, la démocratie fonctionne convenablement. L’histoire montre cependant que la plupart des individus sont fascinés par le pouvoir et qu’ils oublient rapidement qu’ils sont parvenus au sommet grâce à leurs compatriotes. Oint par le suffrage universel direct, le chef de l’État peut se prendre pour un monarque de droit divin, n’ayant de comptes à rendre à personne. S’enfermant dans une bulle, il ne rencontre alors que des gens qui pensent comme lui ou qui n’osent pas lui décrire la réalité. S’il n’a aucune culture historique et politique, il peut se comporter comme un vulgaire people, propre à s’esbaudir au milieu des riches et célèbres.
Or, la politique se fait loin des projecteurs et des paillettes. Quelqu’un qui pense pouvoir diriger un pays doit être conscient de son histoire et de son évolution politique, comprendre les
aspirations des habitants. Pour accéder à la charge suprême, il est donc nécessaire d’avoir accumulé une certaine expérience et, surtout, de s’intéresser réellement à ceux qu’on prétend diriger. Car la politique ne se résume pas à des slogans, à des menaces ou à des opérations de communication propres à séduire des jour nalistes paresseux.
Ce ne sont pas les institutions qui empêchent un dirigeant politique de s’intéresser réellement à la vie de ses compatriotes. On peut bien sûr améliorer tel ou tel aspect afin que toutes les
composantes de la société soient représentées au Parlement et qu’il y ait de véritables contre-pouvoirs face à l’exécutif. Mais là n’est pas l’essentiel. Ce qui distingue un homme d’État d’un vulgaire politicien, c’est sa capacité à comprendre l’intérêt supérieur de son pays tout en accordant une attention particulière à la vie des citoyens, en particulier les plus fragiles. Dans une démocratie libérale, les plus riches et les plus puissants n’ont pas besoin de l’aide de l’État. Ce sont les plus faibles qu’il faut soutenir, comme le rappelle régulièrement le pape François en citant l’exemple de saint Martin de Tours. Pour un dirigeant politique, il n’est pas nécessaire d’être croyant pour adhérer à ce message. Il en va de la cohésion nationale.