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par William Emmanuel
Les élections américaines, pour la présidence et le Congrès, sont devenues un spectacle global que le monde entier est tenu de suivre. Au-delà de la campagne et sa débauche de moyens financiers (on parle d’un budget global de deux milliards de dollars pour les deux candidats à la Maison Blanche !), qui fascinent tant les médias, la bataille électorale
permet d’essayer de comprendre quelles pourraient être les orientations de la première superpuissance.
Sur le plan intérieur, les États-Unis sont confrontés à une forme de guerre civile froide depuis l’irruption de Donald Trump, il y a une dizaine d’années. L’ancien promoteur immobilier a réussi à susciter un culte de la personnalité et recourt à la violence verbale contre ses adversaires et contre ceux qui ne le soutiennent pas. Au point que certains experts républicains espèrent ouvertement une lourde défaite pour permettre au camp conservateur de se reconstruire sur de nouvelles bases. Chez les démocrates, après une phase de marketing électoral consistant à cibler des groupes (Noirs, Latinos, LGBT, etc.) plutôt que l’ensemble des électeurs, Kamala Harris semble comprendre que cette segmentation est dangereuse pour son parti et pour le pays. Mais cela suffira-t-il pour remporter le scrutin ? Pas certain.
S’agissant des relations internationales, les États-Unis suscitent une méfiance croissante dans un contexte géopolitique en plein bouleversement. La guerre entre la Russie et l’Ukraine a abouti à une forme de structuration du « Sud global », groupe de pays refusant de s’aligner sur l’Occident. Le conflit entre Israël et les Palestiniens a fini d’isoler Washington, accusé d’adopter la politique des « deux poids, deux mesures » dans les relations internationales et de mépriser le droit quand il s’agit de soutenir un allié proche.
Les reproches sont largement justifiés. Le paradoxe est que même si les États-Unis sont vivement critiqués, ils sont souvent sollicités. Faute d’avoir pu ou voulu mettre en œuvre une politique de défense autonome, l’Europe est contrainte de rester sous le « parapluie » américain. Face à l’agressivité de la Chine, nombre de pays d’Asie cherchent la protection de l’Oncle Sam.
Mais peut-on compter sur les États-Unis ? Depuis la Première Guerre mondiale, paraphrasant Lord Palmerston, les dirigeants américains ont adopté une approche simple : leur pays « n’a pas d’amis ou d’ennemis permanents ; il n’a que des intérêts permanents ». Si ces intérêts supposent de lâcher certains pays, ils n’hésiteront pas. Dans la nouvelle compétition mondiale, l’Europe, seule région à pouvoir prétendre défendre réellement la liberté et la démocratie, peut-elle défendre ses intérêts face à cet allié qui n’est pas toujours un ami mais dont elle ne peut pas se passer ? C’est la question à laquelle il faudra répondre à l’issue de ces élections....
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