Modernes anciens

Jean-Luc Fournet : Aux origines de l’éducation

Propos recueillis par Victor Dumiot et William Emmanuel

Durant l’Antiquité, l’enseignement était un sujet majeur. Jean-Luc Fournet, professeur au Collège de France, rappelle que l’on cherchait à inculquer aux élèves en deux ou trois ans ce qui pourrait leur être utile dans leur vie d’adulte. Que retenir des leçons des Anciens ?

Titulaire de la chaire Culture écrite de l’Antiquité tardive et papyrologie byzantine au Collège de France depuis 2015, le papyrologue Jean-Luc Fournet étudie les grandes problématiques culturelles de la période allant du ive au viie siècle, notamment celles liées à l’éducation et à la transmission. Ses recherches montrent que les enseignants façonnaient leur matériau pédagogique à partir d’un corpus de sources littéraires. À l’heure où l’on débat des moyens d’améliorer le système éducatif, il nous est apparu naturel d’interroger ce spécialiste sur les évolutions de la pédagogie depuis les Grecs.

 

Comment se structure l’enseignement durant l’Antiquité ?

La séparation en trois niveaux que l’on retrouve actuellement, à savoir élémentaire, intermédiaire et supérieur, existe déjà dans l’école grecque antique. Les textes de cette époque y font constamment référence. Le premier niveau est celui du grammatistès, où l’élève apprend à écrire et à lire ; ensuite vient le grammatikos, où l’on étudie la grammaire, à travers des textes comme l’Iliade et l’Odyssée. Enfin, vient celui du sophiste ou du rhéteur, où est enseignée la rhétorique et qui permet de déboucher sur des études de philosophie. D’ailleurs, ces expressions sont restées : il n’y a pas si longtemps, on parlait encore de « faire sa grammaire » ou de « faire sa rhétorique », pour dire que l’on était à tel ou tel niveau de l’enseignement. C’est la preuve de la pérennité de ce système ! Notons, pour nuancer, que cette répartition tripartite, constamment évoquée dans les textes, n’était pas aussi nette dans la réalité…

 

C’est-à-dire ?

Dans les cités où l’on pouvait se permettre d’avoir des professeurs différents pour chacun de ces trois niveaux, la répartition tripartite fonctionnait. Mais dans la plupart des cas, une telle distinction n’existait pas. Outre que les jeunes s’arrêtaient souvent à celui du grammairien sans faire d’études supérieures, le même professeur se retrouvait à enseigner dans un même espace à des élèves de niveaux différents. Cela, nous le savons grâce à des livres d’enseignement du latin pour hellénistes et du grec pour latinistes, manuels de conversation composés d’un lexique, comme ce que l’on trouve dans nos guides de voyage. Vous savez, des petites phrases toutes faites développées autour d’histoires simples, qui correspondent aux différents moments de la vie d’un individu, et notamment de sa vie scolaire : le petit va à l’école, il prend ses affaires, il se retrouve devant le maître, etc. En lisant ces textes, on se rend compte que dans la même classe se côtoyaient des élèves de niveaux différents, dans une certaine cacophonie, sans doute. Quoi qu’il en soit, il existe dans l’enseignement de cette époque un parcours obligatoire, avec des objectifs pédagogiques précis, comme savoir lire et écrire, ou maîtriser les opérations élémentaires d’arithmétique et des ouvrages comme l’Institution oratoire de Quintilien le démontrent.

 

Pour bien comprendre, quand on parle de « manuels », de quoi parle-t-on ? Est-ce que certains textes sont diffusés, alors même que l’imprimerie n’existe pas encore ?

Nous n’avons pas de manuels au sens moderne du terme, à savoir un outil préexistant que le maître d’école peut utiliser pour proposer des exercices ou des textes à ses élèves. Pour la simple et bonne raison que l’imprimerie n’existe pas. Chaque professeur est donc amené à réaliser lui-même son propre manuel, en fonction de sa pédagogie. Ainsi, ils sont tous personnalisés, « customisés », constitués d’une liste de mots et de textes anciens. On en a retrouvé un certain nombre, par exemple le papyrus Bouriant 1 (actuellement conservé dans la collection papyrologique de Sorbonne Université). Il s’agit d’un codex (un cahier) qui commence par des séries de mots, classés par nombre de syllabes. Viennent ensuite des textes de plusieurs genres. En prose, d’abord, avec des anecdotes, qui tournent autour du philosophe Diogène, assez amusantes, voire franchement scatologiques, ou misogynes…, puis des poèmes, comme les Sentences de Ménandre, des vers moralisateurs, et pour finir, le prologue des Fables de Babrius, qui racontent l’histoire des débuts de l’humanité. Ce codex couvre une partie de l’enseignement qu’avait à dispenser le gramatistès, principalement consacrée à la bonne prononciation des mots, la bonne syllabation. Dans cette civilisation, à l’écrit, les mots ne sont pas séparés par des espaces mais tous collés les uns aux autres. Pour les distinguer, il faut donc repérer les syllabes. Ainsi, il y a tout un processus cognitif à acquérir. C’est l’un des objectifs de l’école. Par ailleurs, les mots que l’on trouve dans ce manuel sont souvent issus de textes connus, comme l’Iliade, et devaient aussi être, je suppose, une initiation à la littérature. La deuxième partie de ce manuel est simplement constituée des textes qu’on faisait lire et écrire aux élèves. Certains ont d’ailleurs connu, grâce à l’école, une grande diffusion : par exemple, on retrouve les Dits de Diogène dans de nombreuses civilisations du bassin méditerranéen.

 

Comment expliquer que ce corpus n’emprunte rien à la Bible ?

C’est un point très intéressant. En effet, ce codex date du VIe siècle. L’Empire romain est christianisé depuis deux siècles déjà et, pour autant, les textes qui sont donnés à lire aux enfants ne sont pas des textes chrétiens. Le christianisme n’a pas fondamentalement bouleversé la pédagogie antique : à une époque où l’on ne pouvait pas impunément se déclarer païen, on continuait à apprendre la littérature à travers, non pas la Bible, mais les auteurs classiques. Ce qui ne veut pas dire qu’on ne retrouve jamais de textes bibliques dans les manuels scolaires. Seulement, on y a recours surtout pour apprendre à lire et à écrire. Quand on veut inculquer les moyens d’argumenter, à savoir la rhétorique, on revient aux auteurs classiques. Car les chrétiens ont très vite compris qu’on était dans deux ordres différents : celui de la foi et celui du raisonnement. Ils se sont rendu compte qu’il était inutile de développer une pédagogie intégralement chrétienne, et qu’il valait mieux garder l’ancien système, ayant conscience que si la rhétorique s’apprend à partir des auteurs classiques, elle permet ensuite de combattre les païens. Bien sûr, certains ont cherché à développer une littérature adaptée à l’enseignement chrétien. Ils ont essayé de transposer, par exemple, l’évangile de saint Jean en hexamètres dactyliques, le vers homérique par excellence, ou d’adapter certains passages de la Bible sous forme de dialogues platoniciens. Mais ils ont réalisé que cela ne servait à rien. Socrate le Scolastique (un historien de l’Église du IVe siècle, qui n’a rien à voir avec le philosophe) dit même que, si la Bible inculque la piété et la foi, elle n’enseigne pas la logique, si utile, ne serait-ce que pour réfuter les païens. Pour l’enseignement, tout le problème sera donc de maintenir une dialectique entre la forme classique et le contenu chrétien de façon à adapter la rhétorique au message de la nouvelle religion.

 

Dans quel but la rhétorique est-elle utilisée ?

Elle apprend à raisonner et à persuader. Les Grecs avaient développé des exercices préparatoires à la rhétorique, nommés « progymnasmatiques ». Par exemple, apprendre à faire une description, un récit, un discours en le mettant dans la bouche d’un personnage célèbre, mais aussi à louer ou à critiquer, etc. Chacun de ces exercices permet à l’élève d’explorer une petite partie du champ réflexif et de sa mise en forme. La rhétorique, c’est le socle de l’enseignement.

 

Que sait-on des élèves ? Qui avait droit à cet apprentissage ?

Ceux qui vont à l’école, ce sont ceux qui en ont les moyens. Vous pouvez imaginer que dans une société rurale, les enfants travaillaient dans les champs avec leurs parents. En revanche, il est difficile, pour ne pas dire impossible, de connaître le pourcentage d’alphabétisation de ces sociétés. Les documents de l’Antiquité ne nous permettent pas de faire de statistiques. Mais les contrats nous donnent quelques indices. À l’époque, on ne les signait pas, on souscrivait : « Moi, untel, je suis d’accord ». On retrouve parfois des formules du type « Untel m’a demandé de souscrire à sa place », qui nous indique que la personne ne savait pas écrire. De là à estimer le nombre de personnes analphabètes…

 

Il n’existe donc pas d’école publique…

En effet, il n’y a pas d’école publique « gratuite ». Dans certaines cités, on peut trouver des professeurs appointés par la municipalité ou l’État pour donner des cours. Mais c’est rare, et dans tous les cas, les familles doivent payer une partie des émoluments. L’exemple de Libanios, qui a vécu au IVe siècle, nous renseigne sur cette question. Originaire d’Antioche, il est à la tête d’une école de rhétorique, qui connaît un grand succès. Dans ses lettres, il lui arrive de râler parce que les parents ne paient pas à l’heure, trouvent des subterfuges pour payer moins, etc. Par ailleurs, à partir du moment où les maîtres n’ont pas de postes officiels, ils peuvent très bien mettre brutalement fin à leurs cours et partir dans une autre cité, où ils seront mieux payés. Certaines lettres nous apprennent que tel élève se retrouve, d’un coup, sans maître et est obligé d’en chercher un nouveau. Voilà qui n’est pas propice à la bonne continuité des études…

 

Les barbares, les esclaves et les femmes sont-ils exclus de ce système d’enseignement ?

Le barbare, en grec, c’est celui qui balbutie, qui n’est pas capable de parler la langue grecque. La civilisation grecque a comme pierre de touche la langue, avec toutes les valeurs qu’elle peut véhiculer. L’autre, c’est donc le barbare. Quant aux esclaves, ils pouvaient jouer un rôle clé dans l’éducation, servir de pédagogues, dans le sens technique du terme, à savoir « celui qui mène à l’école ». Un esclave peut donc accompagner un élève, le corriger s’il ne s’est pas bien comporté à l’école et éventuellement l’aider à faire ses exercices. Les femmes ont évidemment fait les frais d’une société patriarcale. On ne considérait pas qu’elles devaient être scolarisées. Mais nombre d’entre elles ont tout de même pu suivre des études car, dans les bonnes familles, l’enseignement se faisait essentiellement à la maison, sous la férule de précepteurs. Il y a aussi quelques figures de femmes enseignantes, comme la philosophe Hypatie, qui faisait cours à Alexandrie au IVe siècle. Elle a d’ailleurs été lapidée, sous prétexte qu’elle défendait des idées païennes.

 

Existe-t-il un système de punition ?

La coercition physique est omniprésente. L’autorité du maître est très importante, surplombante, et se manifeste par des actes violents, des punitions. L’enfant est une espèce d’animal que l’on doit former, ou dresser. Le mot grec qui désigne cela est paideia, qui signifie à la fois le fait d’éduquer ou d’instruire, et la civilisation dans son ensemble. La paideia représente donc aussi un système dans lequel les êtres se sont élevés au rang d’hommes libres et pensants. Je trouve cette ambiguïté du terme, qui associe l’instruction à la civilisation, très belle. On est pleinement Grec que si l’on a reçu une éducation.

 

Ces maîtres ont-ils des diplômes particuliers ? Ou s’autoproclament-ils maîtres ou instituteurs ?

L’école normale, spécialisée dans la formation des maîtres, est une institution très récente. Avant, les familles recrutaient des personnes qu’elles jugeaient disposer des qualités d’un bon enseignant. Il faut bien s’imaginer qu’à 99 %, ces maîtres sont des précepteurs privés, plus ou moins bons d’ailleurs. On a, par exemple, cette lettre d’un étudiant qui raconte se trouver à Alexandrie pour suivre des enseignements. Il explique que le maître sur lequel il comptait est parti et qu’il ne reste plus que des « déchets ». Et quand je dis « déchets », je traduis poliment… Il y avait donc aussi de mauvais maîtres.

 

Est-ce qu’il existe un système de notation à l’époque antique ?

Non, il n’a pas de notes. L’élève est censé remettre des devoirs et des compositions à son maître, qui les évalue. On a retrouvé des devoirs accompagnés de corrections, mais les appréciations étaient orales.

 

Une place est-elle faite à l’apprentissage sportif ou militaire ?

Le système gréco-romain accorde autant d’importance au corps qu’à l’esprit. Et dans les sociétés archaïques ou classiques, on ne travaillait pas l’un sans développer l’autre. Jusqu’au IVe siècle après Jésus-Christ, on avait encore des gymnases, même en Égypte. Ils offraient aux gens de la bonne société la possibilité de se former aux exercices intellectuels et sportifs. Le problème, c’est qu’on ne connaît pas leur organisation, aucun document ne nous renseignant sur les activités qui s’y déroulaient. Par la suite, on sait que le christianisme s’est concentré sur l’éducation spirituelle. Je voudrais souligner que chez les Anciens, les gymnases sont des lieux très particuliers, où l’on développe à la fois le corps et l’esprit, mais aussi son appartenance à l’hellénisme, dans une conception globale de la culture.

 

Penchons-nous maintenant sur les techniques pédagogiques de l’époque. Quels enseignements peut-on en tirer ?

Certaines choses sont très déconcertantes. Par exemple, pour apprendre la forme des lettres, on donnait aux enfants des textes très difficiles, comme ceux d’Homère, avec ses vers écrits dans une langue archaïque, absolument incompréhensible pour un Grec de 5 ou 6 ans, en particulier durant l’Antiquité tardive. Cela paraît complètement antipédagogique. En se penchant sur ces techniques, on se rend également compte que les élèves apprennent à écrire avant de savoir lire. Pour comprendre cela, il faut se projeter dans l’époque. Comme je l’ai dit, il n’y a ni séparation entre les mots, ni accent, ni ponctuation. Pour les élèves, la lecture d’un texte posait sans doute plus de problèmes que l’écriture, car la plupart des exercices que nous avons retrouvés l’ont été en Égypte. Cela veut donc dire que ces exercices en grec, la langue officielle, étaient confiés à des jeunes dont la langue, comme celle de la grande majorité de la population, était l’égyptien. On cherchait donc à inculquer à ces élèves, en deux ou trois ans, l’essentiel de ce qui pourrait leur être utile dans leur vie d’adulte. Et l’essentiel, c’est de savoir écrire son nom en grec et la formule stéréotypée « je suis d’accord » par laquelle on « signait » les contrats. Ce qui peut expliquer qu’on apprenait à écrire, avant de lire, c’était le plus facile.

 

Quelle est la postérité des techniques pédagogiques de cette époque ?

Le système a fonctionné jusqu’au xixe siècle, partout en Europe. Les exercices progymnasmatiques par exemple – dont la liste a été établie par un certain Théon, un Alexandrin qui a écrit un manuel sur le sujet au Ier siècle de notre ère – ont été traduits en latin et utilisés jusqu’à l’époque moderne, jusqu’à ce que la rhétorique ait été évacuée de l’enseignement en tant que scolastique inconciliable avec l’esprit d’originalité. Depuis une dizaine d’années, la rhétorique fait son retour. Certains collègues essayent de la remettre au goût du jour, comprenant l’importance de ses apports : l’argumentation, le développement d’un raisonnement, l’écoute de son interlocuteur, le dialogue. Autant de qualités essentielles à la vie sociale, et qui font terriblement défaut aujourd’hui. La culture grecque a donc encore beaucoup à nous apporter, notamment la langue, si riche, et qui donne accès à un patrimoine philosophique et littéraire tellement fort qu’elle enrichit les esprits et contribue à développer le sens critique. Voilà pourquoi je suis d’ailleurs pour l’apprentissage des langues anciennes.

 

Quels sont selon vous les contenus ou techniques pédagogiques qui permettraient d’améliorer l’enseignement du XXIe siècle ?

Je pense que la rhétorique a encore son mot à dire, en l’adaptant bien sûr. Au Collège de France, mon collègue Stanislas Dehaene a lancé l’initiative Agir pour l’éducation, qui essaie de réfléchir à ce que l’on pourrait apporter à l’enseignement actuel. Certains collègues et moi-même avons évoqué la piste des exercices progymnasmatiques … Les différentes expériences pédagogiques menées depuis une vingtaine d’années montrent l’efficacité de ces techniques. Je pense que cela nous permettrait de résoudre certains problèmes de notre société, comme l’incapacité à dialoguer, ou l’absence totale d’empathie avec l’autre. Ces exercices permettent également aux enfants, quand ils travaillent sur des textes, de se réapproprier activement la littérature, dont l’enseignement place trop souvent l’élève dans une position de passivité. Au contraire, le fait de construire un discours à partir de modèles le met à nouveau dans une situation d’agissant, de participant. Et, la plupart du temps, cela leur redonne le goût de la lecture.  ...

Durant l’Antiquité, l’enseignement était un sujet majeur. Jean-Luc Fournet, professeur au Collège de France, rappelle que l’on cherchait à inculquer aux élèves en deux ou trois ans ce qui pourrait leur être utile dans leur vie d’adulte. Que retenir des leçons des Anciens ? Titulaire de la chaire Culture écrite de l’Antiquité tardive et papyrologie byzantine au Collège de France depuis 2015, le papyrologue Jean-Luc Fournet étudie les grandes problématiques culturelles de la période allant du ive au viie siècle, notamment celles liées à l’éducation et à la transmission. Ses recherches montrent que les enseignants façonnaient leur matériau pédagogique à partir d’un corpus de sources littéraires. À l’heure où l’on débat des moyens d’améliorer le système éducatif, il nous est apparu naturel d’interroger ce spécialiste sur les évolutions de la pédagogie depuis les Grecs.   Comment se structure l’enseignement durant l’Antiquité ? La séparation en trois niveaux que l’on retrouve actuellement, à savoir élémentaire, intermédiaire et supérieur, existe déjà dans l’école grecque antique. Les textes de cette époque y font constamment référence. Le premier niveau est celui du grammatistès, où l’élève apprend à écrire et à lire ; ensuite vient le grammatikos, où l’on étudie la grammaire, à travers des textes comme l’Iliade et l’Odyssée. Enfin, vient celui du sophiste ou du rhéteur, où est enseignée la rhétorique et qui permet de déboucher sur des études de philosophie. D’ailleurs, ces expressions sont restées : il n’y a pas si longtemps, on parlait encore de « faire sa grammaire » ou de « faire sa rhétorique », pour dire que l’on…

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