Salikoko S. Mufwene : “Le français est une langue hybride”

Propos recueillis par William Emmanuel et Charles-Alexandre Haddad

La langue de Victor Hugo est-elle en danger ? Faut-il avoir peur
de l’anglais ? Pour le linguiste, ces craintes relèvent d’une histoire et de tensions géopolitiques occultant la diversité des pratiques
et les évolutions au sein d’un même ensemble linguistique.

 

Titulaire de la chaire Edward Carson Waller Distinguished Service Professor of Linguistics à l’université de Chicago, Salikoko S. Mufwene étudie notamment l’émergence phylogénétique du langage et la spéciation langagière. Spécialiste des parlers créoles et d’autres formes d’indigénisation des langues coloniales européennes, ce natif de la République démocratique du Congo s’intéresse à la formation de la Francophonie au moment des indépendances en Afrique et en Asie et à la coexistence des langues à l’ère de la globalisation économique mondiale. Il prononcera sa leçon inaugurale le 28 mars au Collège de France, où il occupe la chaire annuelle Mondes francophones.

 

Peut-on parler de créolisation de la langue française ?

La, ou plutôt, les langues françaises peuvent être considérées comme l’aboutissement de la créolisation du latin vulgaire. Mais le terme est impropre car l’émergence des langues créoles ne s’est pas accompagnée d’un bouleversement total des structures grammaticales. À partir du XIXe siècle, au début de la colonisation d’exploitation de l’Afrique et de l’Asie, les Européens ont découvert que leurs langues n’étaient pas parlées de la même façon dans les colonies. S’appuyant sur différents travaux, dont ceux de Charles Darwin, ils en ont conclu que les populations non européennes étaient mentalement et anatomiquement inférieures aux populations européennes. Leurs langues, les africaines particulièrement, étaient jugées moins évoluées, inférieures voire enfantines.

 

Comment le latin s’est-il répandu dans les provinces de l’Empire romain ? 

Les Romains ne pratiquaient pas la colonisation de peuplement ou d’exploitation. Ils établissaient des comptoirs commerciaux dans les provinces conquises, collaboraient avec les dirigeants indigènes et les soutenaient militairement. En les romanisant, ils leur ont aussi donné la possibilité d’apprendre le latin. Mais, au Ve siècle, lorsque l’Empire romain d’Occident disparaît, la plupart des habitants des provinces qui parlaient latin n’en pratiquaient pas la variété classique mais le «latin vulgaire», c’est-à-dire des variétés populaires, non standards, parlées par les légionnaires et par la plèbe à Rome.

À la chute de l’Empire, les Romains qui étaient dans les provinces sont retournés à Rome défendre la ville contre les envahisseurs. Mais les marchands qui avaient établi des comptoirs commerciaux restent et continuent à utiliser le latin vulgaire dans leur profession. Petit à petit, c’est devenu la langue vernaculaire de ces centres urbains naissants, dont l’activité prospérait davantage que celle des milieux ruraux. Ce modèle économique s’est répandu progressivement et avec lui l’usage du latin vulgaire qui, en l’absence de locuteurs d’héritage – tous repartis – pouvant interagir avec les indigènes, a évolué pour donner le français, le catalan, le provençal... Une situation comparable à celle du français en Afrique, qui s’est répandu davantage après les indépendances des pays dits francophones que pendant la colonisation. 

 

Qu’est-ce qui caractérisait la pratique de la langue française dans les colonies ?

Les études sur ce sujet ont longtemps été mal conçues: on comparaît le français ou l’anglais standards à leurs créoles respectifs, en oubliant que les gens qui sont allés dans les colonies de peuplement du XVIIe siècle n’étaient des locuteurs ni du français ni de l’anglais standards mais du français ou de l’anglais populaires. Le français des colons, auquel les indigènes étaient exposés, n’était pas la langue du roi, que l’on parlait en Île-de-France, mais un ensemble de patois et de dialectes. Les langues créoles nous renseignent d’ailleurs sur celles parlées par les colons. 

 

Y a-t-il une survivance d’anciens patois français dans les langues créoles parlées dans les ex-colonies africaines ? 

Oui et non dans le cas des colonies de peuplement, où les non-Européens, surtout Africains dans les Antilles, sont devenus majoritaires. Ici et sur les îles de l’océan Indien, les créoles sont des modifications des français populaires sous l’influence surtout des langues africaines parlées par les populations serviles. Non dans le cas de l’Afrique, parce que la France y a plutôt développé des colonies d’exploitation. Le français qui y a été introduit était un français scolaire qui, jusqu’aux indépendances, était enseigné à l’école à un petit segment des populations autochtones qui pouvait servir d’auxiliaires coloniaux. Ce qui explique que les Africains utilisent parfois le vocabulaire de Victor Hugo et d’autres écrivains classiques, des structures très littéraires que les métropolitains n’emploient plus parce que ça ne fait pas partie de leur langue vernaculaire. 

 

Le terme hybridation à propos de la langue française vous heurte-t-il ? Ou bien peut-on le retenir ?

Je l’aime beaucoup et je suis de ceux qui ont écrit sur son adéquation dans l’explication de l’émergence des parlers créoles. On retrouve le processus d’hybridation dans toutes les variétés européennes, caribéennes et africaines. En biologie, elle se traduit par un métissage, bien qu’on puisse dire que tout enfant est hybride biologique des gènes de ses parents. Pour les langues, c’est pareil. Lorsque deux ou plusieurs d’entre elles se rencontrent, aucune ne peut se maintenir intacte. Il en ressort des variétés hybrides à des degrés variables, mêlant des éléments appartenant aux langues en contact. Dans certains cas, il peut arriver que la langue mère résiste très bien, quoique pas entièrement; dans d’autres, les apports exogènes sont beaucoup plus importants. Le français, ou plutôt les français, résultent de ces hybridations. 

 

Comment analysez-vous le rapport des locuteurs de langues mères aux langues créoles ?

Les Européens ont toujours eu une attitude négative à l’endroit des créoles. C’est l’héritage du XIXe siècle, lorsque les théories de Darwin ont installé l’idée qu’il y aurait des populations moins évoluées biologiquement que les populations européennes. Les créoles devenaient dès lors des langues «bâtardes» ne méritant aucun respect. Les colons eux-mêmes ont souvent méprisé les créoles car ils voulaient être acceptés comme de vrais Français en France, alors qu’ils avaient une position secondaire dans la structure nationale française…

En Afrique, c’est plus ou moins la même chose: pour qu’un Africain soit respecté en France, il doit se débarrasser le plus possible des influences des langues africaines dans sa façon de parler et d’écrire en français, sauf si la version africaine est associée à des personnages particuliers dans sa narration ou sa prose. Léopold Senghor n’aurait jamais été élu à l’Académie française s’il avait eu un fort accent africain ou si, dans son expression écrite, on avait pu détecter des apports linguistiques africains. Les Français en général ne sont pas contents de voir leur langue transformée dans la bouche des locuteurs des langues étrangères, surtout celles considérées comme inférieures. 

 

Vous vivez aux États-Unis. Constatez-vous ces phénomènes pour la langue anglaise ? 

Aux États-Unis aussi, si on est noir et qu’on parle l’anglais avec un accent africain fort, on est souvent stigmatisé. Il y a une variété créole de l’anglais sur la côte qui longe la Caroline du Sud et la Géorgie: le gullah. Ses locuteurs sont très stigmatisés. Pourtant, il est largement utilisé, par les pasteurs de l’Église baptiste, notamment, lorsqu’ils s’adressent à leur congrégation. On constate le même phénomène dans les États du Sud. À Washington, un sénateur de cette région adaptera son anglais en évitant des éléments stigmatisés de l’anglais des États sudistes. Mais dans sa circonscription, il reprend son expression orale habituelle pour se reconnecter avec ses électeurs. En fait, les locuteurs natifs sont tellement versatiles dans l’usage de leurs langues qu’ils peuvent changer de variété comme on change de vêtements, selon les occasions sociales.

 

Qu’est-ce qui détermine que l’une de ces variétés finisse par s’imposer aux autres ?

Concernant l’Europe, plusieurs variétés néolatines ont cohabité simultanément en France, regroupées généralement comme «langues d’oil» et «langues d’oc», selon la façon dont on prononçait le mot oui. Dans cette compétition, les variétés correspondant aux zones économiques les plus riches se sont imposées. Ainsi, la variété de Lyon a déplacé ses voisines. Finalement, c’est la variété néolatine d’Île-de-France qui est considérée comme le meilleur français. C’est le parler de la ville capitale, où siègent le roi et sa cour, puis les institutions politiques centrales, l’Académie française, les grands médias...

Petit à petit, les vaincues, les «patois», ont décliné: leurs locuteurs ont cessé de les parler, en raison de leur changement de vernaculaire ou de leur mort. Même si elles n’ont pas totalement disparu, il faut reconnaître qu’elles ne sont plus très en forme...

La situation des créoles est assez différente: les populations serviles venues d’Afrique devaient parler la langue coloniale, devenue le vernaculaire de la grande majorité de la population aux Antilles et aux îles Mascareignes. Mais il en va des pratiques langagières comme des pratiques culturelles: comme il y a de bons et de mauvais chanteurs, il y a de bons et de mauvais locuteurs. C’est vrai pour une langue étrangère, mais même dans leur langue maternelle, il y a de meilleurs locuteurs que d’autres. De ce point de vue social, certains sont plus appréciés que d’autres, certaines langues ou variétés de celles-ci aussi. Mais les choses se compliquent quand les locuteurs de parlers stigmatisés sont fiers de leur héritage langagier et lui sont loyaux. Ces attitudes sont surtout favorisées par la ségrégation raciale dans les colonies; et les locuteurs n’ont pas l’intention de s’assimiler à la culture des anciens colons. C’est pour cela que leurs parlers survivent, contrairement aux patois de France dont les locuteurs acceptent de s’assimiler culturellement au segment plus puissant de la population.

 

Peut-on considérer que la langue n’est pas forcément un instrument d’intégration ?

Ça, c’est un point de vue idéologique. On insiste sur les ressemblances qui en feraient un instrument d’intégration mais si on insiste sur les différences, elle devient un facteur de discriminations, surtout si elles correspondent à des distinctions de race, d’ethnie, de classe ou d’autres différences sociales. 

 

Parlons du concept de globish. Est-ce un créole ou simplement l’anglais appauvri réclamé par les usages ?

Je préfère réserver le terme de «créolisiation» au contexte colonial. Quant au globish – en anglais, nous parlons de «construct», un concept qui permet d’expliquer un phénomène ou quelque chose d’abstrait –, je ne suis pas convaincu de la nécessité de développer une variété de l’anglais qui serait facile et commode pour tout le monde. Je ne pense pas que les Américains ou les Britanniques soient vraiment favorables à cette idée, car l’anglais est leur héritage culturel et ils souhaitent que les alloglottes l’apprennent le plus fidèlement possible. En plus, les États-Unis et le Royaume-Uni sont des grandes puissances économiques, militaires et académiques, déterminées à imposer leurs normes respectives aux alloglottes. Un certain impérialisme langagier accompagne tout ça. Je ne crois pas non plus qu’un Indien ou un Nigérian cherchant à faire des affaires aux États-Unis souhaiterait parler ce globish appauvri. Pour eux, c’est aussi une question de statut social et de prestige de parler comme les locuteurs métropolitains. Les langues, lorsqu’elles se répandent, s’adaptent aux besoins et aux traditions culturelles des usagers locaux, qui ont besoin de satisfaire leurs traditions en ce qui concerne leurs écologies naturelle et sociale. Ils ont par exemple des concepts qui ne se communiquent pas fidèlement en anglais d’héritage et des exigences pragmatiques ou sémantiques qui diffèrent de celles des métropoles dont ils ont appris la langue. Il faut bien accommoder ces besoins. L’hybridation continue à travers les pratiques des nouveaux usagers… 

 

L’hégémonie de l’anglais va-t-elle disparaître ? Ou bien la version un peu dégradée de l’anglais dont vous parliez va-t-elle devenir une langue mondiale ?

L’histoire de l’anglais ressemble à celle du latin. Plus l’anglais se répand, plus il s’indigénise et plus il y a de nouvelles variétés d’anglais. Et ce sont ces variétés d’anglais qui sont un argument contre le globish. Parce que les gens qui apprennent l’anglais en Inde voient surtout l’intérêt au niveau des interactions en Inde, pas forcément dans celles avec les États-Unis ou le Royaume-Uni. L’anglais va se maintenir, mais il n’est pas sûr qu’il déplacera les autres langues en dehors des colonies de peuplement. En Afrique, l’anglais n’est pas en train de supplanter les langues africaines. Ce qui est arrivé en Amérique du Nord et en Australie aux langues indigènes est la conséquence de la colonisation de peuplement. L’anglais continue à se répandre aujourd’hui parce que c’est la langue de l’impérialisme militaire, économique et scientifique. La plupart des personnes en dehors du monde anglophone apprennent l’anglais comme une lingua franca – un outil de communication entre locuteurs de langues maternelles différentes –, pas comme une langue vernaculaire. 

 

Croyez-vous à l’hypothèse d’un remplacement de l’anglais par le chinois ?

Elle n’a rien d’évident. Les Chinois ont adopté l’anglais pour vendre leurs produits aux pays anglophones, tout comme les pays anglophones utilisent le mandarin pour vendre la technologie et quelques produits de commodité à la Chine. Mais il y a le facteur des disproportions démographiques: pour chaque Américain qui apprend le chinois, il y a peut-être cent Chinois qui apprennent l’anglais. La Chine incite à l’apprentissage de l’anglais parce qu’elle suit un principe économique qui veut que la langue de l’acheteur devienne la langue des échanges commerciaux. Conséquence de cette pratique : dans les pays du Sud global, on néglige l’importance des langues indigènes face à l’échelle mondiale de la globalisation et de la diplomatie. Et les anciennes colonies d’exploitation maintiennent l’anglais comme la langue la plus importante du gouvernement, du système judiciaire et de l’enseignement.

 

L’avenir de la langue française sera-t-il identique ? 

La France a très peur de l’expansion de l’anglais. Non sans raisons historiques: en Amérique du Nord, après la vente d’une grande partie de la Nouvelle-France aux États-Unis au début du XIXe siècle, le français n’a vraiment survécu qu’au Québec, grâce à de multiples interventions politiques et économiques. En Louisiane, le français est en train de disparaître; dans le Maine, au Kentucky, il a pratiquement déjà disparu. Dans ses anciennes colonies de peuplement, le français peut légitimement s’inquiéter de l’expansion de l’anglais.

Mais ailleurs, que se passe-t-il ? Les Africains des pays francophones apprennent de plus en plus l’anglais, mais sans délaisser l’apprentissage du français, parce qu’ils ont besoin des deux langues. Tout comme les Français, qui me semblent guéris de leur phobie de l’anglais! Lors de ma première visite en France, en 1986, très peu de gens parlaient anglais alors que maintenant, certaines personnes préfèrent parler anglais plutôt que français avec moi. Il n’est pas pour autant question d’abandonner le français. Par ailleurs, la langue française n’est jamais menacée dans les pays francophones européens: France, Belgique et Suisse. Dans le reste du monde, il y a une sorte de compétition entre deux langues impériales. Les locuteurs d’héritage de chacune d’elles aimeraient propager la leur le plus possible. Mais ce que je viens de dire contient une certaine fausseté car ce sont les interactions multiples, très dépendantes des relations économiques, politiques et militaires, qui déterminent l’expansion d’une langue. Au Brésil, il fut un temps où la population préférait le français à l’anglais. Cette situation a évolué en raison de l’évolution des facteurs précédemment cités. 

Dans ces pays désormais politiquement indépendants, il faut accepter qu’on puisse apprendre n’importe quelle langue étrangère dès que s’en manifeste le besoin. Et plusieurs langues peuvent cohabiter sans craindre d’être déplacées l’une par l’autre. Généralement, elles ont une distribution complémentaire de leurs fonctions: l’une pour communiquer avec les étrangers, une autre pour communiquer avec ses concitoyens (une langue «véhiculaire»), encore une autre pour mieux communiquer avec les membres de son ethnie. C’est aussi ce qu’il se passe en Europe: on y apprend l’anglais, mais aussi d’autres langues. Beaucoup d’Allemands apprennent le français, qui leur est parfois aussi utile que l’anglais pour se lier au monde extérieur. Ces dynamiques dépendent de facteurs liés à la mondialisation économique.

Donc les inquiétudes de la France, et surtout de l’Organisation internationale de la francophonie, sont liées à l’hégémonie économique, militaire et académique des États-Unis et du Royaume-Uni, alors que le rôle du français semble plutôt s’atténuer, y compris au niveau académique. Les chercheurs francophones veulent élargir le lectorat de leurs travaux. Ils ont besoin de l’anglais pour ça; ironiquement, cette pratique contribue elle aussi à l’expansion de l’anglais. Même si l’enseignement et la pratique de l’anglais – mais aussi de l’espagnol ou du portugais – se répand dans les anciennes colonies francophones d’Afrique, il ne me semble pas qu’il y ait là de vrais motifs d’inquiétude.  

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La langue de Victor Hugo est-elle en danger ? Faut-il avoir peur
de l’anglais ? Pour le linguiste, ces craintes relèvent d’une histoire et de tensions géopolitiques occultant la diversité des pratiques
et les évolutions au sein d’un même ensemble linguistique.   Titulaire de la chaire Edward Carson Waller Distinguished Service Professor of Linguistics à l’université de Chicago, Salikoko S. Mufwene étudie notamment l’émergence phylogénétique du langage et la spéciation langagière. Spécialiste des parlers créoles et d’autres formes d’indigénisation des langues coloniales européennes, ce natif de la République démocratique du Congo s’intéresse à la formation de la Francophonie au moment des indépendances en Afrique et en Asie et à la coexistence des langues à l’ère de la globalisation économique mondiale. Il prononcera sa leçon inaugurale le 28 mars au Collège de France, où il occupe la chaire annuelle Mondes francophones.   Peut-on parler de créolisation de la langue française ? La, ou plutôt, les langues françaises peuvent être considérées comme l’aboutissement de la créolisation du latin vulgaire. Mais le terme est impropre car l’émergence des langues créoles ne s’est pas accompagnée d’un bouleversement total des structures grammaticales. À partir du XIXe siècle, au début de la colonisation d’exploitation de l’Afrique et de l’Asie, les Européens ont découvert que leurs langues n’étaient pas parlées de la même façon dans les colonies. S’appuyant sur différents travaux, dont ceux de Charles Darwin, ils en ont conclu que les populations non européennes étaient mentalement et anatomiquement inférieures aux populations européennes. Leurs langues, les africaines particulièrement, étaient jugées moins évoluées, inférieures voire…

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