Rendons l’Amérique aux Indiens !
par Gabriel Gaultier
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par Gabriel Gaultier
Et si la solution à nombre des maux contemporains passait par le renversement du plus puissant et influent peuple du globe ?
Dans son film Babylone, Damien Chazelle ose, par la bouche de Brad Pitt, une thèse hardie selon laquelle l’Amérique a transformé le cinéma, art d’avant-garde européen, en une industrie de divertissement pour enfants attardés. Étonnez-vous après ça que le film ait été un échec aux États-Unis et un succès en Europe.
Mais élargissons la thèse : n’est-il pas temps de considérer les habitants des États-Unis d’Amérique, par ailleurs autoproclamés Américains, comme des enfants incapables de voir le monde autrement que comme, au mieux, un parc d’attractions, au pire, un défouloir pour pulsions immatures. Rappelons-nous l’île du Pacifique livrée à la dictature d’enfants issus
de la société anglaise décrite par William Golding dans Sa Majesté des mouches : n’est-elle pas une parfaite allégorie des États-Unis et de l’expérience hasardeuse du Mayflower ?
Oui, les USA, c’est bien l’île aux enfants. Une île où l’on continue à jouer avec armes réelles aux cowboys et aux Indiens passé 60 ans – qui d’autre d’ailleurs qu’un pays d’enfants pouvait faire d’un principe d’extermination un jeu de cour de récré. Une île où la boisson numéro un est un soda, où la Terre est plate, où l’on célèbre les citrouilles au lieu des saints, où l’on invente le père Noël. Une île où l’uniforme de préadolescent – jean, basket, casquette de baseball, survêtement, tshirt à message stupide – vaut costume jusqu’à trépas. Une île où l’on transforme le Web en instrument planétaire à diffuser la pire culture potache. Une île où l’on fait du principe de relativité un joujou pour raser deux villes japonaises millénaires et des fusées interplanétaires un bus scolaire pour pique-niquer sur la Lune en y laissant des kilos de déchets.
Si ce n’était que cela, on pourrait s’en amuser. Mais voilà : les États-Unis et leur modèle consumériste exponentiel sont aujourd’hui le fossoyeur en chef de l’avenir de notre planète. Allez parler d’avenir à un pays figé dans une perpétuelle adolescence !
Le moment est venu de siffler la fin de la récréation pour les kids et de rendre d’urgence le territoire des États-Unis à de vrais adultes : ceux qui les occupaient à l’origine, les mal nommés Indiens. Bon point de départ, ceux-ci ne se sont jamais revendiqués propriétaires des dits territoires – ce qui leur a causé bien du tort soit dit en passant. Autre grand intérêt pour tous les habitants de la planète : en matière d’écologie ils furent précurseurs en tout.
À l’heure où nous en sommes encore à songer à donner des droits aux fleuves, aux nuages, aux animaux, les Indiens les appelaient par leurs petits noms bien avant la venue de Jacques Cartier. Sur la côte ouest, certaines sociétés avaient même inventé des sociétés sans hiérarchie, proches des modèles anarchistes et communistes dont l’Europe balbutiera les principes
au milieu du xixe siècle (voir sur ce sujet Au commencement était… Une nouvelle histoire de l’humanité par David Graeber et David Wengrow).
En matière de droits des femmes, ils n’avaient pas trop de leçons à prendre et leur système de justice était un exemple de tolérance et de pardon. Il aura fallu bien des comics et des westerns pour faire passer ces peuples sages pour des brutes collectionneuses de scalps (n’oublions pas que nous avons fait de même avec le grand Abdelkader ibn Muhieddine).
Dieu merci, la culture de ces civilisations merveilleuses est intacte et il leur sera facile à chacun de retrouver sans avoir besoin de planter de clôtures, les territoires Hopis, Apaches, Cheyennes, Navajos, Sioux, Comanches, Arapahos, Hurons… Noms magnifiques qui remplaceront les désormais honnis Texas, Californie, New Jersey, Delaware – mais pas Dakota, nom hérité des Sioux, déjà nommés. Un nom pour ce grand ensemble ? À quoi bon ? On ne va pas recommencer les mêmes erreurs ! La question est plutôt : qu’est-ce qu’on va faire de
tous ces Américains qui vont nous rester sur les bras ?
Gabriel Gaultier a initié l’almanach BigBang, revue d’utopie politique.
L’A C T U A L I T É A U X U S A , V U E P A R F E G G O
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