Jeux olympiques d’hiver
Cinq fois championne d’Europe de patinage artistique, trois fois vice-championne du monde, Surya Bonaly n’a jamais pu obtenir le titre suprême : la faute à son style hors du commun ou à un racisme latent ? En tout cas, sa discipline n’a plus jamais été la même après elle. Avec modestie et un sourire permanent, elle a changé la donne à sa façon.
À travers le haut-parleur du téléphone, la voix de Surya n’a pas changé. Pourtant, même si j’ai couvert toute sa carrière sportive en tant que journaliste, nous ne nous sommes pas parlé depuis 1998. Il y a vingt-trois ans. Il est neuf heures du matin au Nevada lorsqu’elle m’appelle. La patineuse vient de quitter la glace après deux heures intensives durant lesquelles elle a donné des leçons patins aux pieds à ses petits et grands élèves. Autour d’elle, les voix de certains se font brièvement entendre. Et il y a du soleil dans celle de Surya lorsqu’elle leur répond, du soleil comme dans ce prénom choisi par ses parents pour honorer la déesse hindoue du même astre. Entre les vestiaires et les couloirs du Las Vegas Ice Center où elle glisse quotidiennement, Surya se raconte. Installée aux États-Unis après sa retraite sportive en 1998, titulaire d’un passeport du pays depuis 2004, elle a croqué avec appétit dans tout ce que l’Oncle Sam pouvait offrir de spectacles sur glace à une championne titrée réussissant la rare spécialité d’un salto arrière – alias saut périlleux – sur glace. Notamment la fameuse tournée Tom Collins des champions, avec laquelle elle a visité l’Amérique du Nord pendant une douzaine d’années. Il y a eu aussi la troupe d’Evgeni Plushenko, le champion olympique 2006. Avec lui, la Franco-Américaine a traversé la Russie dans les années 2000 « de Moscou au fin fond de la Toundra », précise-t-elle. Dans les vestiaires de ces spectacles grandioses qui lui rappelaient le Cirque du Soleil, la seule Française de la tribu a appris un peu de russe par nécessité, accueillant avec humour son statut de mascotte de la troupe comme le sobriquet de Suryk qui lui était attribué. Durant ses dix-sept années de carrière professionnelle, Surya se sera produite non seulement en Amérique du Nord, en Russie et dans les pays de l’Est, mais également à Haïti, en Guadeloupe, en République dominicaine, à Porto Rico, Kuala Lumpur et même en Corée du Nord : « Trois fois, insiste-t-elle avec un semblant de fierté. C’était une expérience insensée. Même si j’étais là-bas pour faire du spectacle et non de la politique, la beauté du sport est qu’il permet parfois de faire oublier les problèmes pendant les deux heures que dure le spectacle. Et de mettre un peu de baume sur le cœur des gens. »
En 2015 enfin, la tournée anniversaire des 75 ans d’Holiday on Ice lui a permis de retrouver le public français. Un adieu aux paillettes des shows qu’elle n’avait pas anticipé, mais qui s’est imposé à elle : « J’ai été opérée du dos début 2015, révèle-t-elle. Le médecin m’a dit que je devais arrêter les saltos, sous peine de finir dans une chaise roulante. » Surya s’est inclinée et s’est lancée à fond dans une carrière d’entraîneur qu’elle avait déjà amorcée depuis son émigration, entre deux tournées. Mais pas sans regret. « Quand on fait du spectacle pendant autant d’années, on a ça dans le sang, confie-t-elle. Quand j’entends de la musique, j’ai envie de danser, cela bouillonne encore en moi. » Propriétaire d’une maison à Las Vegas qu’elle habite avec sa mère Suzanne, Surya dispense désormais son enseignement sur les deux pistes de l’Ice Center, qu’elle partage avec une petite quinzaine d’autres entraîneurs, beaucoup moins titrés qu’elle. Elle passe parfois en tant qu’invitée dans un autre complexe de la ville plus tourné vers le hockey, mais qui possède trois pistes glacées : « Je n’ai pas d’élèves qui vont aux Jeux olympiques, mais certains ont participé aux championnats des États-Unis, décrit-elle. Je me débrouille pour monter ma petite équipe mais ça prendra des années. Il faut trouver la bonne pépite. »
Elle aurait pu la découvrir pendant qu’elle était à Minneapolis, une ville située dans l’extrême nord du pays et plus orientée vers la glace avec ses quatre-vingt-cinq patinoires. Pourtant, ce n’est pas par ambition que l’ancienne championne a vécu dans le Minnesota entre 2013 et 2018 : « Je suis tombée amoureuse d’un garçon qui habitait là-bas », confie-t-elle. Pete Biver, le garçon en question, est un ancien patineur de couple devenu également entraîneur. Ils ont été un temps fiancés et c’est avec lui que la Franco-Américaine est revenue à Las Vegas, parce que sa maman vieillissait et avait besoin d’elle. Mais aussi parce que le soleil lui manquait. « Quand je sors de la patinoire où je me suis gelée pendant cinq ou six heures, je n’ai pas envie d’avoir encore froid. Avec les palmiers et le ciel bleu trois cents jours de l’année, Las Vegas me rappelle Nice sans la mer. Quand je me lève sur un ciel bleu, je suis tout de suite de bonne humeur. »
« Toute la famille était dévouée à la réussite de Surya. »
Nice, c’est bien là où tout a commencé pour Surya. Il y a quarante-huit ans. Elle y naît en 1973 et elle y est adoptée par Georges et Suzanne Bonaly, un couple de hippies. Contrairement à la légende qui circulera plus tard, le bébé n’a pas été trouvé par ses parents adoptifs sur une plage de l’île de la Réunion. À une cinquantaine de kilomètres de la Cité des anges, les Bonaly ont acheté une maison au confort sommaire sur un domaine de trois hectares. Avec quelques décennies d’avance sur le courant des écologistes décroissants, ils élèvent des chèvres et font pousser des légumes. Surya ne fréquente pas d’établissement scolaire. C’est sa mère Suzanne, qui se charge de son éducation en s’appuyant sur les cours par correspondance. L’électricité produite par les panneaux solaires qu’ont installés les Bonaly alimente le poste de télévision à travers lequel Surya découvre avec des yeux émerveillés la prestation qui fait de Katarina Witt une championne olympique de patinage artistique à Sarajevo en 1984. La glace fait déjà partie de l’univers de Surya, qui a réalisé ses premières glissades à deux ans et demi sur des patins bilames. Guidée des années plus tard par Nicole Erdos sur l’ancienne patinoire en plein air de Nice, la petite fille aux nattes africaines saute et virevolte avec aisance.
Dans ses jeunes années, le patinage n’est pourtant qu’un sport parmi d’autres pour Surya, qui développe ses qualités athlétiques phénoménales en pratiquant l’équitation, l’escrime, le plongeon et la gymnastique. C’est dans la discipline gymnique du tumbling qu’elle remporte ses premiers succès avec un titre de championne du monde espoir. Mais une rencontre va lier pour toujours le parcours de la préadolescente avec la glace. Alors qu’elle patine en séance publique à Nice, Surya est repérée par Didier Gailhaguet, entraîneur national. L’ancien champion de France mène à Champigny-sur-Marne une équipe avec laquelle il espère conquérir les podiums mondiaux. « Didier m’a raconté qu’il avait vu quelque chose d’incroyable, se souvient Annick Dumont, qui entraînait à l’époque avec lui. Il avait été subjugué, il m’affirmait avoir découvert la grande patineuse de demain. Il avait raison. Surya était extraordinaire. Elle parvenait à sauter presque à l’arrêt. »
Séduit par la jeune athlète qui réussit des triples sauts à douze ans, Didier Gailhaguet lui propose de venir s’installer en région parisienne, afin qu’il puisse développer son talent brut. Les Bonaly acceptent et déménagent du jour au lendemain, abandonnant leur paradis : « Toute la famille était dévouée à la réussite de Surya », se souvient Annick Dumont. Le temps de trouver un appartement, les trois Bonaly et leurs chiens habitent dans leur camion aménagé en camping-car. Souvent garé, commodément, sur le parking de la patinoire. Supervisée par Didier Gailhaguet, mais solidement encadrée par sa mère Suzanne qui est professeur d’EPS, Surya n’est pas seulement douée. Elle s’entraîne aussi avec acharnement. « Quelle que soit l’heure à laquelle j’allais à la patinoire, même pour récupérer un sac, elle était sur la glace, se souvient Marie-Pierre Leray, d’un an la cadette de Surya et qui s’est entraînée sur la même piste à Champigny pendant des années. Je ne sais pas combien d’heures elle patinait par jour, mais c’était impressionnant. » « Elle ne se plaignait quasiment jamais, se remémore Annick Dumont avec admiration. C’était une guerrière. » La capacité de travail de Surya dépasse tellement celle des autres patineuses qu’elle a précipité la fin de carrière d’au moins l’une de ses adversaires. Vice-championne de France en 1988 et 1989 et promise à un bel avenir, Claude Péri n’a passé qu’une saison à Champigny sur la même piste que Surya, mais a été marquée : « Elle supportait une charge d’entraînement deux ou trois fois supérieure à la mienne et je le constatais au quotidien, confie trente ans plus tard celle qui est devenue un entraîneur reconnu en France. Je ne me suis jamais voilé la face. Je ne vais pas dire que j’ai lâché l’affaire rapidement, mais en fait si. Je savais qu’elle allait faire quelque chose d’extraordinaire. » L’ancienne patineuse ne se tro-mpait pas.
Surya Bonaly a rompu la glace ©Charlotte Molas
Dès 1991, portée par la suppression des figures imposées qui ne lui réussissaient guère, Surya Bonaly remporte à Sofia le premier de ses cinq titres européens. Elle a 17 ans. Les yeux de l’adolescente prodige, comme ceux de ses entraîneurs et de tout le patinage français sont déjà braqués sur Albertville, où les Jeux olympiques auront lieu l’année suivante. Pour cet événement qui pourrait voir la consécration de la patineuse française devant son public, Annick Dumont chorégraphie, pour l’amoureuse des animaux qu’est Surya, un thème de programme mettant en scène l’indulto : dans ce moment si rare dans la corrida, un taureau particulièrement courageux est épargné par le toréador. Pour interpréter ce programme libre, la meilleure patineuse française se glissera dans une tunique conçue et réalisée par le couturier Christian Lacroix. « La tunique était splendide, mais couverte d’énormes cabochons pesant autour de 200 grammes chacun, se rappelle Annick Dumont. Heureusement, Suzanne a délesté le costume en remplaçant les cabochons par des décorations plus légères. » L’anecdote a son importance. En quelques saisons dans les événements internationaux, Surya Bonaly s’est distinguée de ses concurrentes de multiples façons : par sa peau ébène, sa puissante musculature ou encore sa capacité unique à patiner sans collant. L’athlète en impose à ses adversaires en enchaînant les triples sauts en compétition. Mais elle tente également des quadruples sauts, que très peu d’hommes et aucune femme ne réussissent au début des années 1990. C’est par le truchement de ces quadruples rotations pourtant, que les dissensions latentes entre Didier Gailhaguet et les Bonaly sont révélées au grand jour. À Albertville, une médaille est accessible. Encouragée par sa mère, Surya choisit l’audace du quadruple boucle piqué plutôt que la sécurité d’un programme qu’elle maîtrise. Au mépris des consignes de Gailhaguet. Elle rate le quadruple saut ainsi que sa prestation et finit cinquième. C’est la rupture, définitive, entre le prodige et son mentor. Suzanne, déjà omniprésente mais dans l’ombre jusque-là, va guider la carrière de Surya jusqu’à son terme.
Les Bonaly s’installent alors à Pralognan-la-Vanoise, où une patinoire vient de s’ouvrir. « Nous disposions de toutes les heures de glace qu’elles souhaitaient, se souvient Didier Barioz, directeur des sports de la station, qui accueille la famille et lui trouve un appartement. En échange, Surya faisait parler de Pralognan et donnait des galas gratuitement », rappelle-t-il. Ancien champion d’Europe de figures imposées et l’un des premiers patineurs de couleur à s’imposer en France, Fernand Fédronic passe alors quelques jours dans la station savoyarde pour monter un programme à Surya : « Suzanne lui interdisait de travailler la chorégraphie sans insérer tous les sauts dans chaque séquence, regrette l’Antillais, qui n’a pas poursuivi la collaboration. Il n’y avait que les sauts qui comptaient. » Hors glace, Suzanne impose à Surya un régime macrobiotique qui est peut-être bénéfique à sa santé et à ses performances athlétiques, mais frustre l’adolescente. Dès que sa mère regarde ailleurs, Surya se jette sur les bonbons, les gâteaux, le chocolat. « Je l’ai vu remplir les manches de son pull large de barres chocolatées lors d’un stage de la préparation olympique », confie le journaliste Paul Péret, rédacteur en chef adjoint à France Télévisions et qui a suivi toute la carrière de la championne. « Elle volait des bonbons ou des gâteaux dès qu’elle pouvait, confirme Vanessa Gusmeroli, médaillée de bronze aux championnats du monde 1997 et qui a côtoyé Surya sur la fin de carrière de celle-ci. « Si elle se faisait prendre par sa mère, elle devait faire des pompes et des abdominaux », ajoute-t-elle.
Si Surya n’a que des contacts limités avec les autres patineuses, la présence de Suzanne domine également les relations de la jeune championne avec les médias. Des images de Jamais sans ma mère, documentaire de Paul Péret, montrent Suzanne en train de diriger sa fille dans une séance de pose derrière un photographe perplexe. Et en bord de piste, les deux femmes communiquent généralement par un langage des signes qu’elles sont les seules à comprendre. « Suzanne n’était pas méchante mais elle était une lionne qui défendait les intérêts de sa fille », observe Philippe Candeloro, contemporain de Surya, qui a côtoyé mère et fille dans les tournées de galas. Le double médaillé olympique revendique avoir provoqué des conversations animées avec Suzanne Bonaly : « Je lui disais : tu n’as pas l’impression d’être prise pour une folle, là », rigole-t-il, se souvenant notamment que « Suzanne coinçait des cartes de crédit pour caler les lames des patins de Surya ». L’impact de Suzanne Bonaly dans la réussite sportive de sa fille reste pourtant incontesté. « Surya n’aurait peut-être pas eu la carrière qu’elle a eue sans Suzanne », avance Philippe Candeloro. « S’il n’y avait pas eu Suzanne, Surya n’aurait pas atteint le haut niveau », appuie Fernand Fédronic. « Surya est unique, mais la famille aussi, avec ses excès, mais aussi ses atouts », rappelle Annick Dumont, qui souligne également l’impact de Suzanne dans les innovations de sa fille : « Suzanne n’acceptait pas les limites. Les entraîneurs étaient fascinés par un quadruple saut, mais elle trouvait cela normal. En passant ce message à Surya, elle l’encourageait à réussir des difficultés auxquelles même les hommes ne pensaient pas. »
Mais dans l’univers très codifié et conser-vateur du patinage artistique, les prestations de Surya en compétition demeurent en décalage avec le patinage féminin de son époque. La championne s’est progressivement calmée sur les tentatives de quadruples sauts, mais son style se heurte au scepticisme des techniciens comme des juges. « Sur le plan de la stratégie, la glisse, la vitesse, la chorégraphie, la grâce, tout ce qui fait la beauté du patinage, Suzanne était à côté de la plaque », résume Fernand Fédronic. Membre du panel technique de la Fédération internationale (ISU) depuis 2006, une sorte de contrôle qualité des sauts, pirouettes et éléments réalisés par les concurrents dans les grands championnats, le champion de France 1985 est convaincu que « le petit plus qui manquait à Surya est imputable à sa mère ».
Le point culminant de ces différends irréconciliables éclate aux championnats du monde en 1994. À Chiba, la Française réussit l’une de ses meilleures performances, mais c’est la Japonaise Yuka Sato qui est sacrée de justesse devant son public. Écœurée, Surya arrive en retard sur le podium, se fait prier pour y monter et, les yeux embués de larmes, retire la médaille d’argent qu’on venait de lui mettre autour du cou : « Tom Collins et mon agent m’ont conseillée d’aller parler à Sato et de lui expliquer que mon geste n’était pas dirigé contre elle et le Japon, révèle aujourd’hui Surya. Je l’ai fait. Je ne voulais pas qu’elle se sente mal, parce que je n’ai rien contre elle. » Vingt-huit ans plus tard, cet épisode suscite encore des réactions passionnées. « Elle aurait mérité d’être championne du monde. Quand elle enlève sa médaille, je la soutiens à 2000 % », affirme Claude Péri. « C’est scandaleux », clame Vanessa Gusmeroli. « Elle a bien fait, c’était un vol manifeste », s’insurge Laurent Depouilly, champion de France en 1986 et aujourd’hui entraîneur d’Adam Siao Him Fa, qui participe aux Jeux olympiques de Pékin. « Si elle avait gagné, ça n’aurait pas été choquant, tempère Annick Dumont. Mais on est au Japon, c’est une excellente Japonaise qui s’impose. » « Je n’ai pas été choqué par le résultat, renchérit Fernand Fédronic. Le jury avait des arguments. » Une autre ombre plane sur ce verdict. Trois fois vice-championne du monde en 1993, 94 et 95 mais jamais couronnée, la Niçoise a-t-elle payé son style novateur et athlétique ou… sa couleur de peau ?
« Je suis convaincue qu’il y avait du racisme. »
Surya Bonaly n’est pourtant pas la première patineuse noire à monter sur les podiums mondiaux. En 1986, l’Américaine Debi Thomas est devenue championne du monde. En 1985, Fernand Fédronic était déjà champion d’Europe de figures imposées : « Ma couleur de peau me mettait un peu à l’écart dans le patinage », reconnaît-il cependant, soulignant que Surya deviendra « l’égérie d’une population noire qui se sentait un peu bafouée ». « Je suis convaincue qu’il y avait du racisme », enchaîne Claude Péri, qui a entraîné plusieurs patineurs français de couleur, dont Maé-Bérénice Meité, six fois championne de France. « Surya est l’icône du patinage français, affirme-t-elle. Elle a ouvert beaucoup de portes pour les minorités. » Victime de son style athlétique, de sa couleur de peau ou d’un peu de tout cela, la postérité a donné raison à celle qui demeure l’une des patineuses françaises les plus titrées. En 1996, une rupture du tendon d’Achille a diminué ses capacités athlétiques, mais Surya ne quitte pas la compétition sans un ultime acte de rébellion. Aux Jeux olympiques de Nagano, elle réalise le salto arrière tendu et jambes décalées qu’elle a créé. Bien qu’il soit interdit en compétition. Si cette acrobatie n’est toujours pas autorisée, les poupées russes qui se disputent aujourd’hui les premiers rôles sur les pistes glacées rivalisent d’audace dans les difficultés. Les quadruples sauts se sont banalisés. « Les filles qui les réussissent se rapprochent d’une technique de gymnastique », observe Vanessa Gusmeroli. « Surya a changé la vision du patinage féminin au niveau athlétique », affirme Laurent Depouilly. « On aurait besoin d’une fille comme elle en France », ajoute Claude Péri.
« Elle était peut-être notre Joséphine Baker de la glace », s’enflamme Laurent Depouilly, qui a constaté lorsqu’il entraînait en Afrique du Sud que la notoriété de Bonaly et Candeloro avait traversé les continents comme les décennies. Pas étonnant alors que Surya, un album pour les jeunes enfants qui retrace le parcours de l’athlète, soit paru aux éditions Confettis en juin 2021. De l’autre côté de l’Atlantique, un autre album jeunesse conte les exploits de l’athlète : Fearless Heart, un cœur sans peur. Dans son pays d’adoption, la championne a fait l’objet de deux documentaires, dont un dans le cadre d’une série Netflix. Dans sa patrie d’origine, un podcast en sept épisodes, Corps et lames, lui a été consacré et une série biopic de quatre à six épisodes, réalisée par Audrey Estrougo et produite par Saga Blanchard, est en préparation. Surya est toujours populaire en France, où elle est revenue pour des télé-réalités comme La Ferme Célébrités et sera de nouveau dans l’Hexagone en mars pour assurer son rôle d’ambassadrice des championnats du monde à Montpellier.
« Surya prend soin des gens, c’est un peu mère Teresa. »
L’accueil sera certainement chaleureux. La générosité et le caractère heureux de celle qui n’hésite pas à donner de son temps pour des enfants défavorisés et des animaux en péril sont loués même par ses anciennes adversaires. « Elle s’est toujours super bien comportée avec moi », affirme Claude Péri. « C’est quelqu’un de bien », enchaîne Marie-Pierre Leray. « C’est une fille marrante, qui fait plein de blagues », ajoute Vanessa Gusmeroli. « En dépit de son palmarès, elle n’a jamais eu la grosse tête », salue Fernand Fédronic. « Surya prend soin des gens, c’est un peu mère Teresa, révèle Philippe Candeloro. Pendant les tournées, elle apportait des savons d’hôtel et des restes de nourriture à des sans-abri. Suzanne et elle auraient pu monter les Restos du cœur avec Coluche. » En les écoutant, on se dit que Surya ferait une maman modèle.
Téléphone toujours sur l’oreille, Surya a quitté la patinoire à Las Vegas. Nous continuons à discuter pendant qu’elle est sur la route et finissons par évoquer cette partie douloureuse de sa vie. « En 2011, j’ai fait une fausse couche, révèle-t-elle. J’ai perdu le bébé à trois mois et demi. Je me suis dit qu’il fallait que je me concentre sur ma carrière professionnelle et que mon corps n’était peut-être pas fait pour cela. » La complexité de l’adoption lui semblera-t-elle moins décourageante, maintenant qu’après une douloureuse séparation, Pete Biver et elle tentent depuis peu « de recoller les morceaux » ? Pour l’instant, c’est sur ses élèves que Surya reporte son instinct maternel : « Il y en a une que je suis depuis l’âge de cinq ans. Elle en a maintenant quatorze. Nous avons une connexion formidable. Elle me fait totalement confiance. Comme si j’étais sa seconde mère… »...
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