On ne célèbre jamais assez nos grands écrivains, ceux qui transforment la langue en jeu, en coup-de-poing. Feux sacrés de Cécile Guilbert est indéniablement de cet esprit. écile Guilbert a fait sienne l’idée mallarméenne selon laquelle « le livre est un instrument spirituel ». Non pas une simple distraction, mais une liturgie, sa pierre et sa prière. La lecture, dès l’origine, fut affaire de verticalité. Elle ne se souvient pas de la manière dont elle a appris à lire, mais elle sait que dans sa famille « tout le monde lisait, tout le monde se piquait même d’écrire », et que la langue y était une ardeur fondatrice. Elle a grandi dans l’intimité des œuvres de Colette ou d’Hugo. Mais l’initiation prend la forme du larcin : « J’ai volé beaucoup de livres dans ma jeunesse, surtout dans la bibliothèque de mon pensionnat, notamment ceux dont les fiches étaient vierges, ceux que personne n’empruntait. » Geste fondateur : donner vie aux oubliés. Lire, presto, appelle aussitôt le désir : « Écrire, ça correspondait à un mode de vie. Être tout à fait seule, à l’écart, tranquille. C’est ce qui me fascinait chez les écrivains : cette solitude enfoncée dans le temps. » Le modèle n’est pas tant l’écrivain rutilant que l’ermite opiniâtre. Adolescente privée de télévision, elle se tourne vers la musique : « du punk rock et de la cold wave ». Pianiste depuis l’enfance, elle s’est détournée du classique pour se jeter aux synthés et aux claviers, dans…



