Bibliothèque idéale

Gaël Faye : “Je peux être touché par la littérature de chaque pays”

Hugo Lafont

littéraires, enfant de la poésie et des rimes, Gaël Faye explore « tous azimuts » les styles, les courants comme les mouvements, quand il s’agit de lecture. « Dès qu’il y a quelque chose qui traîne, je le lis. Il y a évidemment, comme pour tout le monde, des oeuvres qui me parlent plus que d’autres, mais je peux être touché par la littérature de chaque pays. » Que cela soit pour s’imprégner de la musique particulière d’un auteur ou pour se fondre dans une atmosphère inconnue, les livres peuvent accompagner à ses yeux le plus doux des moments comme le plus difficile. Des phares au loin dans le brouillard des incertitudes. « Pendant les moments compliqués, on a besoin de s’appuyer sur des vers et des oeuvres pour essayer de donner un peu de chair à notre chagrin. »

 

L’Enfant et la Rivière d’Henri Bosco

« L’un de mes tout premiers souvenirs de lecture. Je l’évoque dans Petit Pays. Ce livre m’avait énormément marqué pour ce qu’il dégageait de sensations. J’ai découvert ce que pouvait être la littérature et ce dont elle était capable. Qu’on pouvait être pris par un style, par une musique et par une atmosphère bien plus que par une histoire, chose dont, jeune, on a finalement peu conscience. Mais cette ambiance si singulière, je m’en souviens encore parfaitement aujourd’hui. »

 

Cahier d’un retour au pays natal d’Aimé Césaire

« Un bon nombre de recueils de poèmes m’ont influencé, comme Paroles de Prévert ou Pigments : Névralgies de Léon Damas mais, pour n’en garder qu’un, Cahier d’un retour au paysnatal d’Aimé Césaire. C’est un peu le symbole à mes yeux de la poésie à son incandescence, ce moment où on est emporté par les mots sans qu’on ait le pouvoir d’en décider, par des formules qu’on ne comprend pas vraiment, jusqu’à ce qu’on ose les apprendre par cœur. Un peu comme pour Rimbaud, il y a chez Césaire une écriture de l’urgence, du rêve et de la révolte totalement hallucinée… C’est tout en même temps. »

 

À pas aveugles de par le monde de Leïb Rochman

« Je pense qu’il y a une oeuvre qui mériterait d’être plus connue, c’est ce roman de l’auteur yiddish Leïb Rochman, survivant de la Shoah. C’est un texte lui aussi halluciné, entre errance et folie, qui provoque des sentiments proches de l’ivresse. Il m’a demandé un effort physique d’une grande intensité, il faut être prêt à accueillir très individuellement ce genre d’oeuvres et être dans une bonne disposition mentale. C’est comme si Rochman avait essayé en un livre de raconter tout ce que peut représenter l’anéantissement, le désastre et ses répercussions. »

 

Près de la mer d’Abdulrazak Gurnah

« J’avais peu entendu parler de l’auteur avant qu’il ne reçoive le Nobel de littérature en 2021. Il vient de Zanzibar, et Zanzibar est un lieu que j’aime tout particulièrement, j’y suis souvent allé écrire. Gurnah a écrit une dizaine de romans en plus de ses nouvelles et de quelques essais. Près de la mer m’a parlé parce que c’est une histoire de réfugiés et d’exil, et ce sont des thématiques dans lesquelles j’ai beaucoup évolué. Il parle aussi de mémoire, du passé, d’une discussion entre générations… C’est une oeuvre très riche, à la musique incroyable. »

 

Amour, Colère et Folie de Marie Vieux-Chauvet

« J’ai découvert ces dernières années l’auteure et dramaturge haïtienne Marie Vieux-Chauvet qui est notamment connue pour ce recueil de trois courts romans. C’est une ouverture unique sur un monde qu’on connaît en France assez peu et sur des époques qui semblent révolues. Elle s’exprime sur la dictature de Duvalier à Haïti, qui avait d’ailleurs à l’époque tenté d’en empêcher la publication. J’encourage beaucoup sa lecture, on tombe rarement sur une langue aussi puissante et un style pareil, on sent le sentiment de révolte poindre à chaque mot. »

 

 



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