Cette conférence a été prononcée le 15 mars 2022 devant un parterre de chefs d’entreprise, à la Maison de l’économie de Paris, par un dénommé Robert Watson.
Nous reproduisons ici l'intégralité de son allocution, ainsi que les réactions offusquées de l’auditoire.
Messieurs,
J’ai le grand honneur d’avoir été choisi pour vous donner quelques conseils afin de faire face au mécontentement grandissant des populations travailleuses.
Je commencerai par le plus important.
Maîtrisez, Messieurs, l’art de communiquer.
Dites : Je suis la probité personnifiée. La probité est la pierre angulaire de ma morale économique.
Dites : Toute iniquité me répugne.
Dites : Je déploierai tous mes efforts pour améliorer vos conditions de travail.
Par exemple, j’exigerai la présence d’un psychologue à l’intérieur de l’entreprise, lequel recueillera vos doléances. Il vous demandera d’une voix suave : « Pourquoi vous dites-vous ensevelis ? Vous devriez vous réjouir au contraire d’avoir décroché une place. D’autres n’ont pas eu votre chance. D’autres seraient prêts à tout pour respirer comme vous des vapeurs délétères. »
Dites : Ne vous inquiétez pas. Tous vos privilèges seront préservés : les cancers du poumon continueront à être pris en charge à 100 %. Nos médecins n’épargneront pas leurs efforts pour vous offrir une fin digne.
Dites : Des brochures de couleurs gaies, portant sur la prévention du suicide, vous seront distribuées. Ainsi que des revues pornos avec gang bang, fisting, bondage et fist-fucking. Et, pour vous faire rêver, des images en série de pénis de gros calibre. (Malaise visible du public à l’énoncé de cette phrase).
Dites : Nos assistantes sociales vous aideront consciencieusement à remplir vos dossiers de surendettement.
Dites : Une infirmière se tiendra au chevet de nos grévistes de la faim. Elle devra les convaincre que l’être prime sur l’avoir auquel, obstinément, ils s’accrochent. Car lorsque l’être a déserté, avoir et néant se confondent. (Perplexité de l’auditoire).
Dites : Cessez vos gémissements, à la fin ! Ils démotivent.
Dites : La présence d’un chasseur d’objectifs galvanisera votre rendement.
Dites : Donnez, de temps à autre, un bon coup de collier. Vous en serez moralement récompensés.
Dites : Tout être a droit à cette expérience créatrice qu’est le travail de confection. Tout être a le droit de se réaliser. Il n’y a pas d’âge pour se réaliser.
Dites : En vous privant de sommeil, le travail de nuit vous fera gagner un temps précieux. Consacrez ce temps précieux à la création artistique. (Les chefs d’entreprise s’entre-regardent, ne sachant que penser de ces discours).
Dites : Personne au monde ne défend plus que moi l’égalité des chances et une meilleure transversalité des schémas organisationnels.
Prononcez tout ce qui précède, l’air pénétré, la main sur le cœur et le lyrisme aux lèvres. La confiance, Messieurs, est le moteur de notre économie. Et le peuple doit vous créditer d’une honnêteté sans faille pour investir et consommer.
Exercez-vous à modeler votre âme sur celle de votre concierge, madame Ginette. Madame Ginette habite une loge de 9 mètres carrés. La loge de 9 mètres carrés de madame Ginette est meublée d’une table, de quatre chaises, d’un buffet surmonté d’un écran plat et d’un canapé convertible en velours marron.
Messieurs ne vous alarmez pas : nous ne vous incitons pas à vous risquer dans la loge encombrée de madame Ginette, mais simplement à échanger quelques mots avec elle sur le pas de sa porte.
Madame Ginette, qui a le visage de ces femmes que la vie a détruites, sera extrêmement flattée d’échanger quelques paroles avec vous sur le seuil de sa porte.
Surmontez votre répugnance.
N’hésitez pas à lui adresser un compliment sur son dernier piercing planté sur le lobe de son oreille gauche, quand le précèdent lui transperçait la langue.
Demandez-lui, tel un bon père de famille, des nouvelles de son fils Kevin.
Madame Ginette a transmis maternellement toute son ignorance à Kevin et les résultats scolaires de celui-ci s’en trouvent affectés. Notamment en matière d’orthographe. Madame Ginette dit que la faute en est à ces jeux vidéo.
Ces échanges avec madame Ginette, bien que des plus pénibles, vous seront fort utiles. Car madame Ginette saura vous éclairer sur les désirs et attentes des populations laborieuses. Elle saura vous informer sur le prix du dernier iPod et sur les derniers épisodes de la liaison entre Léo et Laura, parce que Léo et Laura, c’est fini, la rupture était prévisible, ça fait de la peine, je m’y étais attachée, à force de les voir, on finit par s’attacher.
Lorsqu’elle s’adressera à vous, madame Ginette se montrera encline à s’excuser sans raison. Devant l’absurdité d’une telle attitude, typique, semble-t-il, de sa catégorie sociale, sachez maîtriser vos nerfs. Prenez sur vous. Restez aimables. Et apprenez à mettre votre parole à la portée des gens communs.
En un mot, comportez-vous, Messieurs, en personnes ordinaires.
Interdisez-vous d’exhiber devant Madame Ginette les signes habituels de la prospérité : montre Rolex, bijoux Cartier, veste Dior et autres vanités dont l’exhibition nous semble, d’ailleurs, du plus mauvais goût.
Évitez également de porter des cravates orange ou des Nike vertes à l’instar de Brad Pitt.
Et ne vous flattez pas d’avoir de l’entregent. Il n’y a que les ratés pour exhiber leur petit capital d’influence et citer à tout propos leurs amis haut placés en les appelant Nico, Cricri ou Larita.
Sur le clip destiné à vendre votre image, apparaissez un verre de rouge à la main, faites claquer la langue après l’avoir sifflé, et commandez d’un air bonhomme de la tête de veau. C’est toujours du meilleur effet sur nos populations.
Ne vous montrez pas plus content de vous-même que vous ne l’êtes des autres. Même si cela exige de vous un effort proportionnel à votre suffisance. (Premiers remous de protestations dans la salle).
Adressez-vous à vos subalternes en leur donnant de petites tapes sur l’épaule. C’est ce que fait, dans sa grande simplicité, notre président-directeur général.
Ne jouez pas les importants, puisqu’importants vous l’êtes, que diable, puisque vous avez le pouvoir d’acheter qui vous plaît sans passer par eBay. (Nouvelles protestations).
En un mot, soyez simples. Je vous vois tout déboussolés. Mais je ne vous ai jamais demandé, Messieurs, d’aller faire vos courses chez Leader Price, voyons ! (Rires dans la salle). Ou d’attendre dimanche pour manger du poulet ! (Rires redoublés). Ou de vous nourrir de yaourts périmés ! (Franche rigolade dans le public). Voyons Messieurs ! Je n’ai jamais dit ça ! J’ai tout de même le sens des réalités ! Je vous ai simplement recommandé de vous montrer discrets.
DIS-CRETS. Croyez-moi, la discrétion évite bien des désagréments aux personnes de votre rang. Si toutefois, vous tenez absolument à vous distinguer du vulgaire, si d’être pris pour un raté vous est par trop insupportable, bref, si vous aimez paraître ce que vous êtes, c’est-à-dire plein de vous-même et d’argent, ce qui n’est que trop humain, je vous invite solennellement à vous réfugier dans les îles Caïman, loin des rancœurs populacières et près des banques hospitalières, voilà que je me mets à faire des vers tant le sujet m’inspire. Vous en profiterez pour y bâtir vos résidences et y planquer vos capitaux.
Car il faut, Messieurs, savoir être prévoyants.
L’argent est mouvant et fantasque la fortune. Ne l’oubliez jamais. Des revers peuvent survenir. Une crise boursière, des créances douteuses, les paris d’un trader en proie à la folie, et pfft... Adieu veaux, vaches, actions et dividendes. Mais que ceci ne vous bouleverse pas outre mesure. En toutes circonstances, rappelez-vous ces trois principes merveilleusement consolants :
– A : vous jouez avec de l’argent, mais il s’agit de l’argent des autres.
– B : ce sont ces mêmes autres qui règleront les frais de la ruine, si ruine il y a, ce qu’à Dieu ne plaise.
– C : il serait insensé que vous vous montriez affligés à l’idée de quitter un pays dans lequel les tracasseries financières sont, disons-le, légion. (Malaise dans l’auditoire).
Vous me trouvez cynique ? Mon cynisme, Messieurs, n’est que l’autre face de ma lucidité et de mon pragmatisme. Ressaisissez-vous si ma franchise vous a quelque peu ébranlés.
Si ma franchise, oui, j’aime à parler sans détours avec des personnes de votre stature, si ma franchise vous a donné quelque inquiétude, évacuez vos humeurs peccantes en vous réjouissant des progrès continus qu’affichent vos bénéfices.
Réjouissez-vous aussi de la reprise culturelle constatée depuis quelques mois, reprise qui semble s’accentuer chaque jour davantage.
Je ne saurais trop vous encourager à faire tout votre possible pour favoriser cet élan vers le monde de l’Art et améliorer les institutions culturelles déjà existantes afin que nos employés s’y abreuvent. Œuvrez à ce que les musées et bibliothèques leur soient ouverts.
Tenez-vous informés sur tout ce qu’on nous inflige en guise de productions artistiques, et déjeunez au moins une fois par mois avec un de ces journalistes culturels, remarquables de veulerie, mais qui font et défont, comme on dit, la mode.
Prosternez-vous devant la mode. Mieux, enchérissez sur elle. Soyez hype. Dites Jeff Koons et ses Mickey à la con, c’est totalement dépassé. Vous vous attirerez ainsi l’estime des esthètes. Prenez exemple sur la BSA. La BSA aime ses créateurs. La BSA n’hésite pas à déclarer publiquement qu’elle aime ses créateurs.
Dites : L’Art est la plus grande joie de ma vie et les artistes sont mes amis.
Encouragez les artistes qui sont vos amis à se faire chérir du public en donnant de notre monde une vision positive, ce que seuls, jusqu’à présent, les publicitaires avaient su réaliser.
L’Art est la meilleure consolation dans une vie de merde. (Vifs mouvements de réprobation dans la salle).
L’Art est d’autant plus consolateur qu’il est merdique. (Protestations véhémentes au milieu d’un brouhaha général).
Avez-vous remarqué que tous les gogos s’envoient régulièrement une grosse ration de pâté artistique ? (Le brouhaha continue de plus belle. Une voix s’écrie : « Ce type est un provocateur ! »)
Avez-vous remarqué que tous les gogos sont des forçats du gavage artistique ? (Plusieurs personnes se lèvent dans la salle et crient : « Dehors ! Dehors ! »)
Votre exquise délicatesse vous empêche cependant de condamner de pareilles attitudes. Vous préférez en rire et nous vous comprenons.
À ce propos, favorisez les initiatives de vos amis stand-upper et leurs spectacles dans les stades. Les spectacles dans les stades de vos amis stand-upper sont très prisés de nos populations laborieuses. Plus les populations sont laborieuses, plus elles prisent les spectacles comiques. Le rire est un facteur essentiel dans l’acceptation du malheur par nos populations laborieuses. Le rire des populations laborieuses est essentiellement déclenché par des allusions au cul, aux couilles, aux bites et aux chattes. Les allusions aux juifs et aux arabes ne les font plus rire comme avant.
(Le mécontentement dans la salle ne cède pas. Quelqu’un se lève et dit : « Qu’on foute ce type à la porte ! Qu’est-ce qu’on attend ? »)
Les bons sentiments sont aussi un facteur essentiel dans l’acceptation du malheur par nos populations laborieuses.
Exhortez tous les écrivains qui sont vos amis à écrire des histoires de bons sentiments destinées aux populations laborieuses.
(Plusieurs personnes crient : « On s’en fout ! Faites-le taire ! »)
Intercédez auprès des écrivains qui sont vos amis pour qu’ils magnifient l’amour entre les êtres. L’amour entre les êtres est le piment de l’Art, je veux dire l’ingrédient capable de relever n’importe quel ragoût. (Une voix s’écrie : « Il y va fort ! »)
Incitez les écrivains qui sont vos amis à célébrer dans des sanglots la misère immigrée, et à nous faire espérer que, dans le cœur de chaque enfant de nos cités, germe un jeune Mozart.
Le peuple de France raffole de ces romans tout vibrants d’espérance et de larmes. Car le peuple de France, comme tous les peuples du monde accablés de remords coloniaux, je schématise exprès, le peuple de France a la compassion virulente. (Vives protestations).
Lorsque je vous parle des écrivains, je ne pense pas, bien entendu, à ces mélancoliques qui n’ont qu’une obsession c’est de penser le pire et de le révéler. Or penser le pire contribue à détériorer grandement le respect de l’aliénation et ce respect se perd, les statistiques le confirment. Les agences d’aliénation voient leur nombre décroitre, et la crise aggrave cette tendance. Nous ne savons comment la combattre.
En considération des services rendus, encouragez les artistes qui sont vos amis à vous aider à la combattre au nom d’un monde bon, pacifié, démocratique, respectueux des droits de l’homme, blablabla blablabla. (Après l’agitation, c’est la stupeur qui, à ces blablabla blablabla, paralyse le public).
Mais sachez que, quoi que vous entrepreniez, les populations laborieuses continueront de se plaindre.
Les populations laborieuses se plaignent sans cesse et sur tous les tons. Abandonnez ici tout espoir de les satisfaire. Elles désirent la mer, le ciel, les immensités. Elles désirent toujours autre chose.
Elles désirent l’impossible. La grande vie. Les roses sombres. L’amour sans la douleur. Un jardin frais pour les vieux jours.
La convoitise de ces gens est véritablement sans fond. Leur frustration inapaisable.
Le malheur leur seconde peau.
Si vous avez, Messieurs, la bonté de leur consentir des prêts, les voilà qui se plaignent d’intérêts barbaresques !
Si vous leur laissez tout le temps nécessaire pour effectuer les remboursements, les voilà qui se disent accablés de dettes jusqu’à leur dernier souffle, et traqués jusqu’aux enfers.
Et si, pris de sollicitude, vous leur facilitez l’achat d’une maison, les voilà qui gémissent que vous hypothéquez honteusement leurs biens pour augmenter outrageusement votre fortune.
À ce sujet, permettez-moi, Messieurs, de vous faire remarquer que vous êtes allés trop loin dans votre désir philanthropique de voir tous les affligés de la terre devenir propriétaires. Mais ceci est un autre débat.
Sachez, Messieurs, que les affligés se plaindront, quoi que vous fassiez. Ne vous laissez pas affecter par leurs gémissements. Les affligés sont des professionnels du gémissement.
Et non seulement ils gémissent, mais ils manifestent de surcroît des sentiments hostiles à votre endroit et vous accusent inconsidérément d’avoir perdu tout sens moral.
Rétorquez-leur que c’est en tombant d’un cheval que vous le perdîtes. (Rires dans le public).
S’ils ne se dérident pas à ce trait, ce qui est probable, s’ils se montrent incapables de goûter à ces subtiles facéties, assénez-leur, en leur citant Jacques Lacan que la seule morale qui vaille est de ne pas céder sur son désir.
Et si les arguties éthiques ne leur suffisent point, faites valoir alors, au risque de tomber dans l’esprit de lourdeur qui passe, aux yeux des foules, pour de l’intelligence que :
Primo, les marchés assignant des prix à des valeurs de plus en plus impalpables, il devient tout à fait impossible, au sein de ce jeu abstrait, de faire la part entre l’illusion, la tromperie, et la fraude caractérisée de financiers sans scrupule, lesquels ne sont d’ailleurs, précisons-le, qu’une toute petite pincée.
Secundo, ces mêmes marchés étant soumis à des mouvements collectifs totalement irrationnels, ils fluctuent au gré de peurs imaginaires ou d’emballements optimistes tout aussi infondés (cette économie des affects, comme certains l’appellent, agissant sur les marchés beaucoup plus efficacement que tout calcul mathématique).
Tertio, vous n’êtes pour rien de rien dans ces caprices et variations car ces caprices et variations sont totalement indépendants de votre volonté.
Ceci devrait réduire en miettes leurs dernières objections.
Moment idéal pour passer à l’attaque. Attaquez.
Dites : Nous sommes las d’entendre que nos prétendus abus et nos supposées prévarications ont conduit notre pays vers une fatale banqueroute. Devant cette campagne venimeuse d’opprobres et de dénonciations, il est temps pour vous de passer à la contre-offensive et de clamer les vérités qui s’imposent. Dussent-elles fâcher.
Et en premier, les vérités concernant ceux qu’on appelle les démunis.
Les démunis, messieurs, nous entortillent et nous abusent. Le RSA, à les entendre, aurait des vertus volatiles. Il disparaitrait dès lors qu’il serait empoché. Le même phénomène adviendrait des allocations nombreuses autant que variées qui leur sont généreusement offertes. Celles-ci, selon eux, se dissoudraient, telle l’ombre sous la lumière et sans laisser la moindre trace. Ne vous laissez pas prendre au jeu de ces lamentations.
Retenez ceci : si l’ordre en mathématique est d’aller du moins au plus, l’un des talents des démunis est d’inverser cet ordre et de vous faire accroire que leurs économies vont toujours et irréversiblement vers le moins.
Ce phénomène a un nom : le déni.
Le phénomène du déni consiste à attribuer aux mots un sens diamétralement opposé à celui dont ils sont ordinairement pourvus.
Ce qu’il faut donc entendre lorsque les démunis font accroire que leurs économies vont irréversiblement vers le moins, c’est que celles-ci disparaissent, certes, mais pour mieux progresser, sous une autre forme, vers leur estomac.
Les investigations concernant cette irréversible progression mettent en évidence que l’argent prétendument évaporé a servi à des fins bien connues de nous autres économistes : manger et boire sans mesure.
De tels excès s’avèrent doublement dangereux puisqu’ils attentent à leur capital santé autant qu’à leur capital tout court.
Petite remarque en passant : sachez que les démunis préfèrent souffrir d’indigestion plutôt que de jeter les restes. C’est d’un vulgaire ! (Toussotements et malaise dans la salle).
Cette impossibilité à jeter les restes relève d’un comportement atavique qualifié par les psychanalystes de rétention sadique-anale.
Messieurs, soyez de bon conseil face à ce symptôme de rétention sadique-anale dont souffrent fréquemment nos démunis.
Faites un appel pressant aux sentiments républicains et hygiéniques qui sont les leurs en leur intimant de réduire dans les meilleurs délais les diverses sustentations dont ils s’écœurent.
Mettez à la disposition des familles des brochures contenant :
– des programmes diététiques à base de légumes verts – couleur de l’espérance ! – : courgettes, poireaux et autres herbacées riches en fibres ;
– des recettes allégées à base de racines (les racines sont tendance cette saison) dont la mastication, je vous prie de le noter, renforce les muscles zygomatiques, déclencheurs du rire. (Perplexité dans le public) ;
– des informations sur la valeur nutritive des principaux aliments, car ces gens-là, si on les laissait faire, boufferaient de la terre. (Le malaise du public va grandissant) ;
– l’éloge poétique d’un esprit sain dans un corps sain.
Encouragez les exercices physiques, excellents pour l’organisme, et n’hésitez pas, dans cette optique, à accélérer les cadences sur les chaînes de montage.
(Une voix dans la salle s’écrie : « C’est franchement intolérable ! » Quelques personnes quittent la salle avec fracas).
L’accélération des cadences sur les chaînes de montage est un des remèdes les plus efficaces pour lutter contre l’embonpoint. (Manifestations bruyantes de désapprobation. Les chefs d’entreprise présents s’en vont les uns après les autres).
Sachez enfin que des savants admirables travaillent depuis plusieurs années à la conception d’images alimentaires (dans la salle à présent vide, deux gardes du corps se dirigent vers l’économiste et le saisissent à bras-le-corps) capables de tromper la faim (bien que malmené, l’économiste continue à énoncer son discours.) et c’est un grand motif d’espérance pour les esprits visionnaires que vous… (L’économiste est jeté à la rue et ses dernières paroles sont inaudibles). ...
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