Melvil, l’indemne

Depuis son premier rôle, à l’âge de 10 ans, Melvil Poupaud a tourné avec les plus grands noms du cinéma d’auteur, sans bruit excessif, sans concessions aucunes. Rencontre avec une star singulière, qui a succombé aux lumières spirituelles plutôt qu’à celles de la célébrité.   Je retrouve Melvil Poupaud un soir chez lui, vers la gare de l’Est, deux jours avant qu’il ne rejoigne le festival de Cannes. L’acteur de 50 ans est à l’affiche de deux films en compétition : L’Amour et les Forêts de Valérie Donzelli et Jeanne du Barry de Maïwenn. Sur le chemin, je fais ce que je ne voulais pas faire : je consulte sa filmographie sur mon téléphone. La vie filmique de l’acteur est une incroyable histoire du cinéma, un long fleuve intranquille de participations à des œuvres essentielles, réalisées par des metteurs en scène majeurs. Un vertige m’attrape. Nous nous connaissons un peu et depuis un certain temps, et j’avais une vague idée de l’homme. Mais les noms de Raoul Ruiz, de Jacques Doillon, d’Éric Rohmer, ou, plus proche de nous, d’Arnaud Desplechin, de François Ozon, de Xavier Dolan, de Justine Triet (Palme d’or à Cannes cette année) et tant d’autres, côte à côte, ouvre un espace qui impressionne. À cet instant je me rappelle que Melvil ne possède pas de smartphone. C’est un fonctionnement du monde qui ne lui convient pas. Autour d’une bonne bouteille, je lui dis avoir revu l’après-midi même, Le Journal du séducteur de Danièle Dubroux, adapté du roman éponyme de Søren Kierkegaard. « J’adore cette…