De l’autre côté du miroir

Naomi est un prénom peu commun. Cela peut entraîner des confusions. Ainsi, l’activiste canadienne Naomi Klein raconte qu’elle a parfois été « confondue » avec la mannequin Naomi Campbell par des interlocuteurs peu perspicaces. Elle n’en a pas tiré ombrage. Il n’en a pas été de même lorsque, au milieu de l’épidémie de covid, Naomi Klein s’aperçoit que ses comptes de réseaux sociaux sont assaillis de commentaires peu amènes de gens qui la prennent pour Naomi Wolf. La comparaison est moins élogieuse, et encore plus surprenante. Comment peut-on rapprocher en effet la militante de gauche, pourfendeuse du capitalisme, activiste climatique, auteur de best-sellers comme No Logo, La Stratégie du choc et Tout peut changer et la complotiste Naomi Wolf qui se répand sur le réseau social de Steve Bannon pour dénoncer la dictature sanitaire et la tentative de génocide prétendument liée aux vaccins ? Certes, celle que Klein appelle désormais « l’autre Naomi » a elle aussi commencé sa carrière comme auteure féministe et progressiste, certes les deux Naomi sont juives et n’ont qu’une dizaine d’années d’écart, mais les ressemblances s’arrêtent là. Klein et Wolf sont aux antipodes l’une de l’autre, non seulement sur l’échiquier politique, mais dans leur rhétorique et leur façon d’aborder les enjeux clés du moment. Quel est donc ce monde où les limites deviennent si mouvantes et si floues que même les identités les plus affirmées se dissipent ? Confinée avec son mari et son fils dans une maison posée sur un rocher de Colombie-Britannique, Naomi Klein se lance alors dans une enquête pour…