Étienne Robial
Étienne Robial

BON PIED, BON OEIL

Philippe Trétiack

Le diable est dans les détails
Même si son nom est peu connu, Étienne Robial est partout sous nos yeux.
Habillage de chaînes de télévision, pochettes de disques, maquettes de journaux, objets du quotidien, ce génial graphiste a envahi notre univers visuel. Mieux, il l’a défini.
Ce n’est pas parce qu’il a 77 ans qu’Étienne Robial ne lit pas Tintin. Il ne l’a jamais lu. Ou alors pour en dire du mal. Au point d’avoir placardé au mur de son atelier du quatorzième arrondissement de Paris, une affichette où l’on distingue le célèbre reporter en imperméable barré de cette formule « Not made in Belgia » La BD, Robial la méprise. Pour la Bande dessinée c’est autre chose mais nous y reviendrons. En vérité, Robial ferait un excellent personnage de bande dessinée. Au demeurant il l’a été quand Florence Cestac, son ex-compagne et mère de l’un de ses fils, a écrit et publié Le démon de midi dont il est en partie le héros, à son corps défendant.
Au physique, il est moyen. Un peu enveloppé peut-être mais pour le reste, la production, la création, l’invention, l’innovation… c’est un géant. Dans un article paru dans Libération il y a près de vingt ans, Anne-Marie Fèvre le résumait d’un titre « Robial, un homme de caractères ». On ne saurait mieux dire. Son univers c’est le graphisme, les logos – qu’il préfère appeler des marques –, les alphabets, l’édition, la titraille et puis, et peut-être surtout, l’habillage, comme on baptise les chartes graphiques qui, depuis ses interventions, définissent l’identité visuelle des chaînes de télévision. à son actif rien de moins que les univers de Canal+, de M6, de la Sept (devenue Arte), de la Chaîne Parlementaire, de Public Sénat mais aussi celui du PSG et de tant d’autres éléments de notre décor national. Et ce n’est pas tout. La maquette des mythiques revues de bandes dessinées Métal Hurlant et À Suivre, comme celles des magazines Mademoiselle Age Tendre, Les Inrockuptibles, Diapason, Parisien Magazine, Télérama, Le Point et, plus récemment, L’Équipe. La charte graphique des éditions Denoël ou Vertical… c’est encore lui. N’en jetez plus, pourrait-on dire. Eh bien si, car cela ne fait que commencer.
En vérité, ça commence comme ça. Robial veut être architecte. Il ne s’est d’ailleurs jamais vraiment remis de ne pas l’être, même si chacune de ses pages composées l’est avec la sûreté d’un Le Corbusier et le savoir-faire onirique d’un affilié du Bauhaus. Ce n’est pas pour rien que, il y a peu encore, il habitait dans une maison édifiée par Robert Malet-Stevens, où il avait comme voisin l’acteur Claude Piéplu, mythique voix des Shadoks. Reste que, déboulant aux Beaux-Arts au début des années 60, il dérive et se retrouve dans l’atelier de dessin. Il s’y fait la main, et comme il a l’esprit d’escalier et que chez lui les idées s’arriment les unes aux autres, il choisit pour thème de diplôme de fin d’études les dominos. Il les redessine, les colore, bouleverse l’ordonnancement des points sur les rectangles blancs et triture tout cela avec une telle dextérité qu’il termine premier de sa promotion. Destiné à rafler tous les double six, Robial, en s’évertuant à faire entrer des ronds dans des carrés, a sans le savoir résolu sa propre quadrature du cercle. Il se penche aussi sur la cocotte en papier, activité de détente chérie des fonctionnaires en ces années calmes. Robial est un joueur. Le diplôme lui ouvrant l’accès à une bourse d’études, il part en Suisse, à Vevey, pour suivre des cours dans la prestigieuse école des métiers d’art. Là, il apprend ce que rigueur veut dire. Comme il porte des pantalons de velours, qu’il a les cheveux aux épaules, l’allure bravache et la gouaille franchouillarde à la lippe, il se dégote aux Puces une blouse de chirurgien militaire, frappée d’une grande croix rouge sur la poitrine. Le premier jour, comme il pénètre dans l’école, il se fait aussitôt alpaguer par les autorités locales. « Vous êtes Français ? Oui, c’est évident. Eh bien cher Monsieur, vous allez de ce pas chez Migros faire l’acquisition d’une belle blouse bien blanche, avec une poche pour y mettre vos crayons. » Et dans la foulée, avec le même accent suisse, le Directeur lui conseillera gentiment, mais fermement, d’aller se curer les ongles. « Vous iriez chez un médecin qui a les mains sales ? Non. Ce que nous offrons à nos clients est du même ordre que la médecine. Alors, au lavabo ! » Dans cette école, Robial, qui croyait tout savoir, découvre qu’il ignore beaucoup de choses et d’abord les fondamentaux. Comme il traite ses outils par-dessus la jambe, on lui conseille, toujours gentiment, de se prêter au jeu de l’apprentissage et il découvre que, en effet, il ne sait pas se servir d’un compas, ni d’une équerre. Depuis, il a appris.

En vérité, ça commence comme ça. Robial veut être architecte. Il ne s’est d’ailleurs jamais vraiment remis de ne pas l’être, même si chacune de ses pages composées l’est avec la sûreté d’un Le Corbusier et le savoir-faire onirique d’un affilié du Bauhaus.

Quand il sort de cette école, Robial est blindé car, à l’esprit bohème infusé aux Beaux-Arts de Rouen, il vient d’adjoindre la discipline un peu coincée de la nation helvète dont on sait la netteté dans le graphisme. Robial est prêt pour conquérir le monde à coups de crayons. Sauf que mai 68 rôde dans les couloirs. Alors de sa province, il fonce aux Beaux-Arts de Paris pour se mettre au service de la révolution. Il participe à la diffusion de l’Enragé, journal créé par les Éditions Pauvert auquel collabore Siné. Et voilà que dans la foulée des années post-soixantuitardes, en vacances au Cap-Ferret, il décide de fêter le 14 juillet à sa façon. En spécialiste des couleurs, il rafle tous les drapeaux bleu-blanc-rouge qui pavoisent les villas disséminées dans les pins, pour leur en ôter deux couleurs sur trois. Restent de belles oriflammes dont le rouge clinquant défrise l’électorat local. Robial est arrêté. Il a 23 ans et plonge pour 18 jours en prison pour en ressortir privé de ses droits civiques. Il ne les récupérera qu’en 1981 avec l’arrivée à la présidence de la république de François Mitterrand. En sus, il écope avec ses camarades d’une amende équivalent à 65 000 euros actuels « quand, à l’époque, un paquet de gauloises vaut 85 centimes ». C’est du lourd et comme de la prison à l’armée, il n’y a qu’un pas, le voilà troufion en Allemagne, section disciplinaire. Il décore vaguement le mess des officiers et, grâce à quelques relations tissées dans le combat révolutionnaire, se met à dessiner des pochettes de disques pour le label Barclay… Il en réalisera ainsi une centaine. Au retour, il tripote la maquette, rencontre Régis Pagniez du groupe Filipacchi, collabore avec Roland Topor, retouche des photos, travaille à l’aérographe, séduit Serge Lutenz et l’édition allemande du magazine ELLE, bref touche à tout, en duo avec sa copine de l’époque Florence Cestac. Et c’est ensemble qu’ils repèrent une petite librairie de livres d’occasion à vendre, située rue du Théâtre, à Paris. Son nom : Futuropolis. Ils l’achètent.
C’est un tournant. Robial devient non seulement libraire, mais surtout éditeur. Lui qui méprise la BD des illustrateurs, s’entoure d’auteurs, les Bilal, les Tardi, ceux qui deviendront des stars dans leur discipline, souvent grâce à lui. La bande dessinée pour adulte est balbutiante. Il en est un des pionniers. Évidemment rien n’est simple. Quand au fil d’une histoire publiée, un lecteur tombe sur une fellation au détour d’une case, ça fait désordre et le livre de la catégorie jeunesse bascule dans l’édition pornographique. La différence ? La taxe à 33 %. Alors sous la pression générale, Robial devient un combattant des droits des dessinateurs. Il fout la pagaille dans l’édition car à l’époque, les illustrateurs ne touchent pas de droits d’auteur. Bientôt, ses livres rencontrent des succès phénoménaux comme le Voyage au bout de la nuit de Céline « illustré » par Tardi. 280 000 exemplaires. L’aventure s’achève en 1990 quand, fatigué, Robial vend Futuropolis aux éditions Gallimard. Fin de la période éditoriale, durant laquelle, précise Robial, il a publié « non pas des albums car album c’est albumine, cela veut dire blanc, mais des livres » Une activité qui lui aura tout de même valu de faire des rencontres prestigieuses comme Eddy Mitchell, Alain Resnais, Marcello Mastroianni et Federico Fellini… tous fans de bande dessinée.
Robial tourne la page. Il faut dire qu’il a de quoi s’occuper. Car avant de fermer boutique, il a reçu la visite d’un premier client lambda venu lui proposer un petit boulot. Faire le générique d’un film intitulé Le Fond de l’air est rouge. Ce client c’est Chris Marker, auquel Robial s’écrie qu’il « n’a jamais fait cela et qu’il n’y connaît rien ». « Justement », lui répond Marker. Enfin, toujours avant de mettre la clef sous la porte, il a vu un autre client la pousser. Un habitué du lieu, qui vient ce jour-là, non pas pour feuilleter des nouveautés importées des États-Unis mais pour proposer à Étienne Robial de plancher sur l’image graphique d’une nouvelle émission qu’il va lancer avec des jeunes : Les enfants du Rock. Ce client s’appelle Pierre Lescure. La mécanique s’enclenche avec une petite chaîne de télévision qui n’existe pas encore mais qui va bientôt occuper la scène, notamment grâce à Robial.
« Ce furent des temps héroïques », dit-il. Pour sûr. Pas ou peu payé, travaillant jour et nuit, surtout la nuit, fonçant à Londres pour monter les génériques des émissions dans les studios de la BBC délaissés du crépuscule à l’aube, Robial invente tout. Et d’abord une image. Celle d’une chaîne dont le code couleur est le noir. Pour signifier qu’elle va émettre 24 heures sur 24, il colle sur ce fond noir une ellipse arc-en-ciel qui tourne sur elle-même. Ensuite et comme dans un magazine, chaque émission y est présentée par un carton où est simplement écrite, au Futura, la raison d’être la plus basique qui soit : SPORT, CINÉMA. S’y ajoutent des jingles entre voix et fond sonore indéterminés et la couleur est donnée. « Nous avions opté pour le vibraphone car c’est un instrument qui ne s’identifie à aucune culture précise, pas comme la cornemuse ou la guitare flamenco, et nous avons pu ainsi décliner nos jingles dans les onze pays où Canal s’est implanté par la suite. » De la cave au grenier, Robial va intervenir sur tout. Sur ce qui apparaît à l’écran bien entendu, mais encore sur la charte graphique de l’entreprise, du papier à en-tête à l’uniforme des hôtesses, toutes vêtues dans des gammes de gris de chez Agnès B. Parce que ces années sont folles, parce que, à chaque festival de Cannes, plus de 250 personnes de la firme descendent sur la Croisette, il conçoit encore les cartons d’invitation, les badges, les blousons… Robial va ainsi officier pendant près de 25 ans à Canal+. « Lescure voulait que je sois présent tout le temps, même lors des réunions où l’on discutait d’investissements boursiers. C’était très valorisant, mais parfois franchement casse-pied. Reste que c’était vraiment une bonne boîte. Un jour, André Rousselet m’a appelé en compagnie du regretté Mathias Ledoux. Il nous regarde et dit “Je n’ai pas eu souvent le temps de vous exprimer mon admiration, alors félicitations pour tout le travail accompli.” Et il nous a glissé, à chacun, une enveloppe avec un million de francs. »
En ces années fastes, l’argent coule à flots. Cela le change de ses débuts, quand Lescure lui conseillait d’aller peaufiner la charte graphique de M6, une chaîne concurrente, parce que Canal ne pourrait pas le payer suffisamment. Désormais Robial sait à peu près ce qu’il vaut. Alors il est cher. « C’est une loi », reconnaît-il . Et sur ce sujet, ses anecdotes sont légion. « Un grand patron, un très grand patron, nous a commandé un travail. Tarif : 58 000 euros. Il tique. Bon, en vérité nos tarifs sont appliqués à la tête du client. Alors on fait un geste. On coupe la poire en deux : 29 000 euros ». On remplit la mission et le très grand patron nous invite à fêter cela. Nous arrivons, près de la place François 1er. Il est en retard. On attend et finalement on débouche les roteuses. Et je demande alors ça lui a plus ? Ah non me répond l’une de ses proches collaboratrices, il ne l’a pas vu. Aussi, évitez d’en parler. Ah bon. Mais alors pourquoi ce verre ? Mais pour vous remercier d’avoir coupé la poire en deux. » Une autre fois, il est appelé pour redessiner l’image d’une grande chaîne de télévision populaire privée française. À la remise du travail, il annonce la somme : 850 000 euros. Silence. Les clients ont l’air déçus. Et ils le  ! « Seulement 850 000 ? On escomptait quelque chose de plus ambitieux ». Robial perd un marché que la concurrence raflera pour quatre fois cette somme. « Ça m’apprendra dit-il » et d’ajouter : « Quand un ami me demande de lui faire un truc gratos, je le fais, mais je lui signifie bien que cela vaut 30 000 euros. Sinon, dès que j’aurai le dos tourné, il va repeindre en bleu ce que j’avais dessiné en rouge, et il le fera sans m’en parler, soucieux de ne pas me déranger « déjà que tu m’avais fait le truc gratos, je n’allais pas t’appeler un dimanche. » Et tout le travail est saboté.

Ce client s’appelle Pierre Lescure. La mécanique s’enclenche avec une petite chaîne de télévision qui n’existe pas encore mais qui va bientôt occuper la scène, notamment grâce à Robial.

Au quotidien, Robial s’amuse et dans le même temps fulmine car selon lui, la France, contrairement aux Pays du Nord, manque de clarté, de lisibilité, de soin. « Nos bords de routes ont non seulement cradingues mais ils sont dangereux. En Suisse, les services de la voirie retracent chaque année les bordures avec une belle peinture blanche, et le tout avec précision. Les lignes droites y sont bien droites, ce qui semble évident, mais ne l’est pas en France où on laisse pousser des herbes folles au milieu de l’autoroute et sur les bords des routes ; et tant pis si nos trottoirs trop étroits vous occasionnent des gadins ». Il est encore plus sévère avec nos camions de déménagement. « Ce ne sont pas les immeubles qui font les villes, mais les déménageurs. On ne voit qu’eux. Aux Pays-Bas, les camions sont nickels, magnifiques avec des raisons sociales aux lettres bien dessinées. » À le croire, la simple vision d’un semi-remorque tractant sa cargaison du côté de Rotterdam peut vous donner envie de dénoncer un bail pour vous installer ailleurs. Et les voitures de police ! « Voyez le jaune fluo des véhicules en Belgique. Splendide ! Ici, on colle trois bandes d’adhésif sur la portière d’une bagnole pour faire Gendarmerie et ce quelle que soit la voiture, alors ce qui est censé s’adapter à une carrosserie de Peugeot zigzague sur celle d’une Ford, mais on s’en moque ! » 
Robial n’est pas qu’un graphiste compulsif. C’est encore un collectionneur dément. à son actif, il possède la collection complète de la Série Noire et, mieux encore, la collection complète des « livres Club ». Déconsidérés, souvent réalisés à la va-comme-j’te-pousse par des artistes renommés, ils cumulent les bizarreries. Robial en a disposé toute une série sur ses étagères, et tous sont énigmatiques. Un ouvrage porte pour titre les deux lettres M et G. Rien d’autre. Il faut l’ouvrir pour découvrir qu’il s’agit de La Mère, le roman de Maxime Gorki. D’autres s’ornent d’un titre écrit sur deux pages, un autre encore d’une suite de pages sans utilité de différents verts, autant d’expérimentations, d’étrangetés que lui seul peut-être apprécie pour ce qu’elles sont : des audaces. À côté des livres, Robial collectionne les disques, évidemment, mais aussi les cafetières et les théières, les objets en verre moulé, les lampes de bureau, les taille-crayons à manivelle – sa planche à dessin en supporte une bonne quinzaine – et encore les curvigraphes, les gommes, les compte-fils, et surtout les crayons. Là, ça devient franchement inquiétant car, non seulement il en stocke dans tous ses tiroirs, ce qui lui va bien car Robial est un homme à tiroirs, mais en sus il en conserve, avec amour, tous les résidus, moignons, portions de crayons que son labeur a usé par les deux bouts. D’où une magnifique collection de trognons de crayons télévision, bleu d’un côté, rouge de l’autre. Avec une grande générosité, sachant que moi aussi je les aime, ces crayons Janus, il m’en offre une paire, et d’antiques, l’un de marque Messidor n°88, l’autre Arcolor 2697 EG, entendu que Robial ne cite jamais une couleur, un stylo, un porte-mine sans en donner la référence exacte du catalogue. Ce n’est pas à lui que vous ferez passer un gris PMS 401 pour un PMS 403.
Avec son œil de lynx, rompu à tout calculer, à tout calpiner, il redessine le monde en permanence, sans intention particulière, comme malgré lui. « Allez voir l’enseigne de la gare Montparnasse. Le deuxième et dernier S y a été boulonné à l’envers. Personne ne le voit, moi si ! En Allemagne, on aurait vissé cela sur un support noir, pour que les lettres gris métal ressortent. Pas chez nous ! Notre culture visuelle est lamentable. »
Philippe Trétiack
Architecte, professeur, journaliste et écrivain. Il est l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages dont La vie Blindée (Seuil), Faut-il pendre les architectes ? (Seuil), Paris vu du ciel avec Yann Arthus-Bertrand (Le Chêne), De notre envoyé spécial (Éditions de l’Olivier), Arnys & Moi (Éditions Plein Jour).
Parce qu’il a fait ses classes en Suisse, parce qu’il a le sens de la composition, des maquettes, des pages, des slogans, Robial divise tout en carrés, soigne les proportions. Lui, l’amoureux du sculpteur helvète Max Bill et de l’artiste Jean Arp, dont il préside la Fondation à Clamart, soigne les arrondis et les rapports d’échelle. « Diviser une surface c’est le b.a-ba de notre métier. Qui consiste tout de même à faire en sorte que ce que quelqu’un veut vendre, il le vende au mieux. Que son potentiel client comprenne immédiatement de quoi il retourne, qu’il ait accès à toutes les informations nécessaires ; s’il s’agit d’un concert, par exemple, il faut qu’on capte avec facilité le lieu, la date, l’heure etc... Et si, en plus cela lui plaît, bingo ! Il n’est pas important que ce soit joli mais il faut que ce soit efficace. Que cela frappe, se mémorise, s’imprime sur la rétine et dans l’esprit de celui qui regarde. »
La fabrique d’Étienne Robial, entretiens avec Antoine Guillot, ed. B42, 112 p., 20 €
Le Musée des Arts Décoratifs lui consacre une rétrospective intitulée « étienne + robial. graphisme & collection, de futuropolis à canal+ », du 10 novembre à la mi-juin 2023.

Tout cela, Robial l’explique à ses étudiants de Penninghen. Pour beaucoup c’est un dieu. Pour quelques-uns, de plus en plus nombreux, c’est un diable. « Une étudiante à qui je demandais où était son travail, m’a répondu “je ne l’ai pas. Je n’ai pas voulu le dessiner sur du papier et comme cela j’ai sauvé un arbre. Je le mettrai sur le serveur.”. » On en est là. Robial a parfois l’impression de décrocher un peu de l’univers des instas et des clics. N’empêche, son talent est si vaste qu’il faudra faire avec lui encore un bon moment. Celui qui inventa la notion d’habillage à la télévision se moque des modes. Quant à la concurrence, elle peut aller se rhabiller.

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Le diable est dans les détails Même si son nom est peu connu, Étienne Robial est partout sous nos yeux. Habillage de chaînes de télévision, pochettes de disques, maquettes de journaux, objets du quotidien, ce génial graphiste a envahi notre univers visuel. Mieux, il l’a défini. Ce n’est pas parce qu’il a 77 ans qu’Étienne Robial ne lit pas Tintin. Il ne l’a jamais lu. Ou alors pour en dire du mal. Au point d’avoir placardé au mur de son atelier du quatorzième arrondissement de Paris, une affichette où l’on distingue le célèbre reporter en imperméable barré de cette formule « Not made in Belgia » La BD, Robial la méprise. Pour la Bande dessinée c’est autre chose mais nous y reviendrons. En vérité, Robial ferait un excellent personnage de bande dessinée. Au demeurant il l’a été quand Florence Cestac, son ex-compagne et mère de l’un de ses fils, a écrit et publié Le démon de midi dont il est en partie le héros, à son corps défendant. Au physique, il est moyen. Un peu enveloppé peut-être mais pour le reste, la production, la création, l’invention, l’innovation… c’est un géant. Dans un article paru dans Libération il y a près de vingt ans, Anne-Marie Fèvre le résumait d’un titre « Robial, un homme de caractères ». On ne saurait mieux dire. Son univers c’est le graphisme, les logos – qu’il préfère appeler des marques –, les alphabets, l’édition, la titraille et puis, et peut-être surtout, l’habillage, comme on baptise les chartes graphiques qui, depuis ses interventions,…

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