Avec La Vie sans fondement, Nicolas Krastev-Mckinnon propose une magnifique contre-histoire de la maladie. Une ode à la vie. Tous mes amis ont des problèmes de cul. Ils en parlent sans cesse, comme d’une sorte de maladie, allant de pulsations du bas ventre en frustrations, de déserts de chair en orgies suantes. Ils fantasment sans la vivre l’idée très certaine d’un cul toujours plus puissant, d’un cul toujours plus portant. Une sorte de cul de la vie, qui serait notre horizon ultime. Tenir droit, se coucher sans cesse, jamais s’asseoir, et fuir la glue du repos en pénétrant le cortège du plaisir qui pétarade. Fuir pour ne pas tomber. Avec La Vie sans fondement, Nicolas Krastev-Mckinnon raconte l’histoire d’une immobilisation forcée. Un jeune homme que la vie bouffe, qui «rêve de grands espaces et de départs en furie», courant les agitations du monde comme un joueur fou de tennis sur le court, est freiné par son corps – ou plutôt, par son cul. Les médecins lui expliquent que sa pathologie est rare: il a le coccyx qui pousse telle une épine transgénique. La première opération ouvre une béance impossible à refermer – avec elle, la porte de tous les enfers. Infection, surinfection, plusieurs mois d’hospitalisation et d’opérations successives pour rattraper le carnage originel. Le séant a dérobé la place du cœur, cet empereur à la peau nécrosée impose un temps nouveau: celui d’une cicatrise en guerre qui ne veut pas cicatriser. Voilà tout l’enjeu de ce récit. D’abord, montrer que…
